Confrontés à la forte augmentation des cachets des artistes, à l’explosion des coûts liés à la sécurité et à la baisse inexorable des subventions publiques, les festivals doivent se réinventer pour continuer à séduire.
France. Le week-end des 23 et 24 juin ont eu lieu deux festivals musicaux majeurs : Solidays à Paris et Hellfest à Clisson (Loire-Atlantique). Le premier, qui a fêté cette année sa 20e édition, est le plus grand festival francilien et il a largement battu son record de fréquentation (212 000 spectateurs) ; le second, dans sa 13e année, en a attiré presque autant (180 000). Outre le nombre de tickets vendus, les deux festivals ont un point commun : une thématique forte – la lutte contre le sida pour l’un, les musiques extrêmes pour l’autre –, bâtie patiemment au fil des ans. Une ténacité qui a permis de surmonter les difficultés auxquelles se heurtent actuellement d’autres festivals : une concurrence importante (dans le Morbihan, par exemple, tous les week-ends estivaux comptent au moins trois rassemblements musicaux quelque part dans le département) ; la hausse des coûts de programmation (il faut avoir les reins solides pour surenchérir afin d’assurer la présence des têtes d’affiche, celles qui déclenchent l’achat de places) ; et l’envolée des frais de sécurité pour faire face aux risques terroristes. Ainsi, le festival Microclimax, mêlant sérigraphie, littérature et musique, qui devait avoir lieu du 6 au 8 juillet sur l’île de Groix, vient d’être annulé : ses organisateurs ne pouvaient payer les 19 800 euros demandés par l’État pour assurer la présence des gendarmes.
Le recours aux subventions publiques n’est pas non plus la solution en ces temps de contrainte budgétaire, même si 60 % des festivals, tous genres confondus, sont soutenus financièrement par des collectivités locales : celles-ci estiment souvent moins coûteux et plus rentable sur le plan des retombées économiques de verser une subvention ponctuelle que de s’engager sur des programmes culturels à l’année. Mais comme les sommes allouées sont en baisse constante, l’argent public compte désormais pour moins de 20 % du budget moyen d’un festival de musique (1,15 M€ en 2016), contre 41 % pour la billetterie et 21 % pour la buvette et les produits dérivés. À moins d’avoir la chance, comme le festival de photos en plein air de La Gacilly (Morbihan), d’être totalement financé par un industriel (le groupe Yves Rocher), il reste à l’organisateur d’un festival à séduire sponsors privés, mécènes et organismes professionnels pour boucler les 20 % manquants à son financement.
Un pari réussi par We Love Green, le festival à la fois intello (50 conférenciers, scientifiques et philosophes y animaient des débats), technophile (un village des start-up était présent) et écolo (utilisation exclusive de gobelets recyclables, ramassage et recyclage des mégots de cigarettes…) qui ouvrait les 1er et 2 juin à Paris au bois de Vincennes la saison des festivals franciliens. Résultat de ce positionnement « branché », We Love Green a réuni pour sa septième édition 74 000 festivaliers (+ 21 % par rapport à 2017) et les sponsors s’y sont pressés. De son côté, Rock en Seine, qui conclura, comme à son habitude, fin août, la série des festivals en Île-de-France au parc de Saint-Cloud (Hauts-de-Seine), compte sur ses têtes d’affiche résolument d’avant-garde pour se distinguer, ainsi que sur une campagne promotionnelle innovante : du 11 au 17 juin, le festival a pris possession de la station de métro Duroc sur la ligne 10 (celle acheminant les festivaliers), qui s’est alors appelée « Durock ». De plus, douze étudiants de l’école Estienne avaient chacun imaginé une affiche aux couleurs de Rock en Seine, métamorphosant les quais, au grand étonnement des voyageurs.
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Festivals de musique, le salut par l’innovation
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°505 du 6 juillet 2018, avec le titre suivant : Festivals de musique, le salut par l’innovation