Dans les pas de Rimbaud

Depuis, son visage et ses poèmes ne l’ont plus quittée. « Je l’adoptai comme mon compatriote, mon frère et même mon amant secret », se souvient-elle dans Just Kids, un livre sorti en 2010 dans lequel elle retrace ses débuts et sa carrière à New York avec son ami Robert Mapplethorpe. À l’occasion des 150 ans de la première publication d’Une saison en enfer, en 1873, Gallimard a invité la poétesse, chanteuse et écrivaine américaine à accompagner le texte intégral, augmenté de documents, d’autres poèmes et de lettres de Rimbaud à sa famille. Une saison en enfer a été la drogue de mes jeunes années, l’élixir recelant les outils et la méthode pour renverser les fausses idoles. Tel est le pouvoir exaltant de la poésie », écrit-elle en introduction dans Anniversary, un texte dans lequel elle retrace son premier voyage en France, entrepris en 1973, dans les pas du poète, de Paris à Charleville, à l’approche du centième anniversaire de la première publication de ce recueil de poèmes. « J’avais 26 ans. La nuit, je me produisais dans de petits clubs. La journée je travaillais au sous-sol d’une librairie. Mes rêves de Rimbaud se transformèrent en poèmes. » Cinquante ans plus tard, ils se prolongent en photographies, dessins, peintures et textes émouvants sur son rapport au poète. On y retrouve son sens de la narration, son goût du détail et son écoute. Cette citation qu’elle a fait sienne, on y repense au fil des pages. La photographie, plus précisément le Polaroid, après la mort de son mari en 1994, suivie un mois plus tard de celle de Todd, son frère, lui a permis de se reconstruire, mais aussi de développer un journal de bord, poésie visuelle à l’image de ses écrits. Pendant la pandémie, pour rester connectée au monde, elle a créé un compte Instagram et trouvé dans ce format « le moyen de partager [ses] découvertes, passées ou récentes, de célébrer des anniversaires, de [se] souvenir de ceux qui sont partis, de rendre hommage à notre jeunesse », écrit-elle dans Un livre de jours, dont la parution chez Gallimard (400 p., 26,50 €) est une autre belle invite, mais, là, à l’accompagner sur une année, jour après jour.