Pour la première partie de sa vente, le lundi 28 novembre, Christie’s proposait une sélection modeste de toiles modernes et impressionnistes. Le petit nombre de visiteurs, la veille au soir, avait laissé planer quelque inquiétude sur la vente d’un grand paysage de Klimt, très généreusement estimé, et sur plusieurs autres œuvres.
LONDRES - Christie’s considère sans doute le résultat de cette vente comme une réussite, avec vingt-neuf lots vendus sur quarante et un, pour un total respectable de 13 680 000 livres (116,2 millions de francs). Les ventes comparables de juin et de novembre 1993, avec des catalogues plus importants, avaient atteint respectivement 8 370 000 et 12 880 000 livres (71 et 109,5 millions de francs).
Il n’y a pas eu d’offres pour le tableau phare, Barque sur la Seine à Jeufosse de Monet, estimé 700 000 / 900 000 livres (5,9 à 7,6 millions de francs). En revanche, Le Jardin de paysan de Gustav Klimt, estimé 3,5 à 5 millions de livres (29,7 à 42,5 millions de francs), vendu lundi 28 novembre, est devenu la toile la plus chère de la saison d’automne : il a été acquis, pour le compte de deux clients inconnus, par la comtesse Pilar de la Béraurdière – membre du conseil d’administration de Christie’s –, au prix de 3,4 millions de livres (28,9 millions de francs), prix de réserve probable. Il n’y a guère eu d’enchères pour cette pièce, acquise par la Galerie populaire de Prague en 1910, puis échangée contre d’autres œuvres d’art en 1968.
La Récolte des Foins de Pissarro, estimée 500 000 à 700 000 livres (4 175 000 à 5 845 000 franc), a été acquise par une acheteuse présente dans la salle, malgré Michael Findlay, qui portait des enchères au téléphone pour le compte d’un acheteur de New York.
Tête de femme, une grande étude au pastel de Picasso, estimée 1,4 à 1,8 million de livres, a atteint 1,9 million de livres (16,1 millions de francs) après compétition entre deux enchères téléphoniques. Le marchand de New York William Beadleston a acquis, pour 600 000 livres (5,1 millions de francs), le premier bronze figuratif grandeur nature de Giacometti, Femme qui marche, estimé 600 000 à 800 000 livres. Un bronze créé en 1932-1934 et fondu en quatre exemplaires en 1955.
Une huile de Klee avec incisions, Aquarium, estimée 400 000 à 600 000 livres (3,4 à 5,1 millions de francs), très admirée avant la vente, a été acquise par un acheteur non identifié, assis au troisième rang, pour 660 000 livres (5,6 millions de francs). Une étonnante composition de Miró, Les échelles en roue de feu traversant l’azur, estimée 1,5 à 2 millions de livres, est partie sur enchère téléphonique à 1,2 million de livres (10 millions de francs). L’identité du vendeur est restée inconnue, mais la même pièce avait été proposée chez Christie’s New York le 14 novembre 1990, où elle avait atteint l’enchère folle de 7,1 millions de dollars (39,3 millions de francs).
La vente parallèle de Sotheby’s, le lendemain soir, était enrichie de vingt tableaux, œuvres sur papier et sculptures provenant de la collection Alfred Richet : tout a été vendu, sauf une pièce, mais deux autres ventes ont laissé penser que Sotheby’s disposait d’une latitude de réserve considérable. Ces pièces faisaient l’objet d’un catalogue à part, et l’atmosphère créée grâce à ces premières ventes a permis à vingt-sept des trente-neuf lots restants de trouver preneur.
Faute de pièce comparable au paysage de Klimt vendu chez Christie’s, le total des ventes de Sotheby’s s’est monté à 10 260 000 livres (87,2 millions de francs), une bonne vente si on la compare aux 17 600 000 livres (environ 150 millions de francs) de juin (Ière partie), qui comprenait des œuvres de Manet et de Monet, et aux 8 300 000 livres (environ 70 millions de francs) de novembre 1993.
Dans la collection Richet, parmi les pièces les plus précieuses : une grande gouache de Pablo Picasso représentant Dora Maar assise, estimée entre 300 000 et 400 000 livres, a été achetée 410 000 livres (3,485 millions de francs), par les marchands John Pillar et Libby Howie – probablement pour des clients – après une compétition serrée avec trois rivaux téléphoniques ; un collage cubiste de Juan Gris, estimé entre 450 000 et 550 000 livres, est parti sur enchère téléphonique à 530 000 livres (4,5 millions de francs). Le lot le plus remarquable de la soirée, une aquarelle de Picasso de 1901 représentant une entraîneuse du Moulin Rouge, estimée entre 900 000 et 1 200 000 livres, est partie à 1 650 000 livres (14 millions de francs) après une âpre compétition entre deux enchères téléphoniques.
Toujours par téléphone, un autre acheteur a acquis, pour 320 000 livres (2,7 millions de francs), une Vénus endormie de Delvaux, estimée 350 000 à 550 000 livres, mais un Jardin nocturne, du même auteur, n’a pas trouvé d’acheteur, pas plus que deux statuettes d’Henry Moore en bronze . La première des deux était pourtant une délicate maquette de groupe, vendue par Wilfred Cass pour renflouer son jardin de sculpture de Goodwood. L’artiste Danny Moynihan a acquis l’une des œuvres mineures de cette soirée pour 28 000 livres (233 800 francs) : une cire de Rodin représentant la tête de Balzac, estimée 30 000 à 40 000 livres.
1. Pablo Picasso, Tête de femme, 1921, 64,8 x 50,5 cm, Christie’s, 28 novembre, 1 900 000 £, 16 100 000 F, (Est. : 1 400 000 / 1 800 000 £)
2. Pablo Picasso, Au Moulin Rouge (La Fille du roi d’Égypte), 1901, 63 x 48 cm, Sotheby’s, 29 novembre, 1 650 000 £, 14 000 000 F, (Est. : 900 000 / 1 200 000 £)
3. Alberto Giacometti, Femme qui marche, 1932-1934, fondu en bronze en 1955, H. 151 cm, Christie’s, 28 novembre, 600 000 £, 5 100 000 F, (Est. : 600 000 / 800 000 £)
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Un Picasso détonnant
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°10 du 1 janvier 1995, avec le titre suivant : Un Picasso détonnant