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Projet de loi Macron. La révolution attendra

Par Alexis Fournol (Avocat à la cour) · Le Journal des Arts

Le 10 février 2015 - 642 mots

Si le futur « commissaire de justice » est toujours d’actualité, les commissaires-priseurs judiciaires ne bénéficieront d’aucun avantage.

PARIS - Si la loi du 10 juillet 2000 a séparé les activités judiciaires et volontaires, près des trois quarts des commissaires-priseurs conservent aujourd’hui la double casquette en ayant une étude de commissaire-priseur judiciaire adossée à une société commerciale, dénommée « opérateur de ventes volontaires ». Le projet de loi pour la croissance et l’activité, dit projet de loi « Macron », qui vient d’être amendé en séance publique, ne concerne que la casquette judiciaire, dont le champ d’activité principal s’articule autour des procédures collectives et des inventaires successoraux. Nulle révolution de ce côté, les prisées et ventes successorales relèvent toujours du monopole des officiers ministériels et publics, mais une évolution se fait jour. D’après un nouvel article, et selon des modalités à prévoir dans un délai de dix mois suivant la publication de la loi, les commissaires-priseurs judiciaires et les huissiers pourront être désignés en justice pour « exercer certaines fonctions de mandataire judiciaire à titre habituel ». L’objectif sous-jacent est assurément de favoriser la mise en place de la future grande profession de « commissaire de justice » selon le projet initialement retenu. Celle-ci est aujourd’hui restreinte à la seule fusion des commissaires-priseurs judiciaires et des huissiers, écartant les mandataires de justice, « de façon progressive, en prenant en considération les incompatibilités et risques de conflits d’intérêts », selon les termes de la nouvelle rédaction de l’article 20. Et le gouvernement conserve la prérogative de procéder par voie d’ordonnance pour dessiner dans les dix mois suivant la publication de la loi les contours de la nouvelle profession. La dernière mouture du texte retenue n’est donc qu’une solution de compromis.

Lobbying des notaires
Sur certains aspects, la révolution de la profession a même été étouffée dans l’œuf. Les dispositions de l’article 16 qui prévoyaient de déplafonner le nombre d’offices dont un même commissaire-priseur judiciaire pourrait être titulaire ont été supprimées. Le principe du binage est conservé, la liberté d’installation et l’interprofessionnalité devant suffire « à créer les conditions d’un rapprochement entre professionnels qui désirent un exercice régional ou national ». De même, l’ouverture d’un bureau annexe, qui devait répondre à un régime déclaratif aux termes du texte initial, demeure in fine soumise à autorisation. Seule modification, l’appel à manifestation d’intérêt dans les zones ciblées sera réputé valoir autorisation. La crainte d’une concurrence déloyale, d’une mise en péril du maillage territorial et de l’obstacle à l’installation des jeunes a eu raison des velléités premières du législateur. Enfin, l’article 3 de l’ordonnance du 26 juin 1816 est maintenu. L’exercice des fonctions de commissaire-priseur judiciaire se réalisera toujours sur l’ensemble du territoire national, à l’exception des départements du Bas-Rhin, du Haut-Rhin et de la Moselle.

Que retenir alors des derniers débats dans l’Hémicycle ? Avant tout l’expression du très fort lobbying des notaires. La suppression du fameux corridor tarifaire, au profit du maintien d’un tarif unique, c’est eux. La précision des catégories de zones d’implantation également. Quant au salariat, une harmonisation sur la situation des notaires est opérée. Les études de commissaires-priseurs judicaires pourront à terme employer deux salariés par associé et non quatre, comme cela était préalablement prévu. En revanche, le reste du texte révisé par la commission spéciale à l’Assemblée nationale n’a pas évolué, que ce soit sur les modalités de l’indemnisation liée à l’installation d’un nouvel acteur ou sur la fin d’exercice en fonction d’une limite d’âge fixée à 70 ans.

Le gouvernement autant que les rapporteurs ont fortement amendé le texte, les rapporteurs révisant à la baisse leurs intentions premières. La profession de « commissaire de justice » est actée, le Sénat ne reviendra assurément pas sur ce point. L’avenir de la profession de commissaire-priseur judiciaire se révèle ainsi incertain. Ce sera alors l’occasion pour une partie d’entre elle de se réinventer.

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Commissaire-priseur tenant le marteau lors d'une vente. © Photo : J.-C. Figenwald - Courtesy Drouot

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°429 du 13 février 2015, avec le titre suivant : Projet de loi Macron. La révolution attendra

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