Cinq maisons de ventes profitent de la Semaine et du Salon du dessin, pour disperser plus de 1 400 feuilles pour un total espéré de 8,6 millions d’euros.
PARIS - Profitant du Salon du dessin au palais de la Bourse (lire p. 26) et de la Semaine du dessin au cours de laquelle certains musées ouvrent leurs collections de dessins au public, les maisons de ventes parisiennes, conscientes que tous les regards sont tournés vers Paris, organisent dans la dernière semaine de mars des ventes de dessins anciens et modernes.
Le 26 mars, Christie’s offre un rare dessin de la Renaissance, de l’élève de Raphaël, Polidoro Caldara, dit « Polidoro da Caravaggio », Notre Dame en pâmoison sur la route du calvaire, estimé 200 000 à 300 000 euros. La vente comprend aussi un pastel de Quentin de La Tour, Portrait de la princesse de Rohan, estimé 100 000 à 150 000 euros ; un dessin recto verso de Claude Lorrain, Deux bateaux amarrés (recto) et Personnage debout (verso), estimé 50 000 à 70 000 euros, ainsi que trois aquarelles – une redécouverte – de Louis-François Cassas : Vue d’Antioche, Turquie, Vue de Tripoli et Vue de Baalbek, Liban (est. 25 000 à 35 000 euros chacune), réalisées durant son voyage au Moyen-Orient en 1784.
Jeune femme en buste tenant une rose, un pastel de François Boucher qui est une étude pour Le Bouton de rose, tableau daté 1765 et conservé à l’université de Notre-Dame, Illinois (est. 15 000 à 20 000 euros), et Gabrielle, femme nue assise de profil d’Auguste Renoir (est. 20 000 à 30 000 euros) sont à saisir chez Piasa.
Le 27 mars, Millon & associés met en avant deux feuilles, une sanguine représentant San Filippo Benizi en gloire, de Baldassare Franceschini dit « Il Volterrano » (1611-1689), de l’ancienne collection Susini, qui est un travail préparatoire pour le tableau exécuté en 1670 pour le cardinal Léopold de Médicis à Florence (est. 12 000 à 15 000 euros), et Cour de ferme (1764) par Hubert Robert au crayon noir, de l’ancienne collection de la comtesse de Béhague puis du marquis de Ganay (est. 3 000 à 4 000 euros). Ader présente en vedette un important ensemble de 116 dessins et estampes du sulfureux artiste montmartrois Georges Bottini (1874-1907), estimé 210 000 à 300 000 euros l’ensemble.
Les études appréciées
Dans sa vente du 26 mars, Artcurial propose une gouache de 1774, en bon état de conservation, de Charles Joseph Natoire, L’Arrivée de Cléopâtre à Tarse (est. 60 000 à 80 000 euros), reprise d’un carton de tapisserie conçu pour la tenture de l’histoire de Marc Antoine commandée par le surintendant des Bâtiments du roi en 1740 (Manufacture des Gobelins). La maison met également aux enchères un dessin de Noël Hallé (1711-1781), Scilurus, roi des Scythes, entouré de ses enfants, exposé au Salon de 1769 (est. 30 000 à 40 000 euros) et réalisé d’après un tableau commandé par le roi de Pologne Stanislas Poniatowki. Jamais passée en vente, l’œuvre est restée dans la famille de l’épouse de l’artiste jusqu’à nos jours ! Mais elle n’est pas inconnue du public puisque elle a figuré dans l’exposition « Diderot et l’art de Boucher à David », à Hôtel de la Monnaie à Paris en 1984-1985.
Citons aussi une collection de dessins de l’époque romantique ainsi que des œuvres de Prud’hon, Vernet, Greuze, Van Loo, Van der Meulen et Seurat. Pour autant, « cette vente n’est pas très solide en raison d’un phénomène global de raréfaction intense des œuvres importantes, déplore Matthieu Fournier, directeur du département de tableaux et dessins anciens d’Artcurial. Ces cinq dernières années, nous réalisions des ventes autour d’1,5 à 2 millions d’euros, ce qui n’est plus le cas aujourd’hui. En janvier dernier, la vente de dessins anciens de Christie’s New York a été un véritable fiasco, avec moins d’1 million de dollars de résultat. L’ensemble des collectionneurs était atterré. C’est dire la pénurie du marché, même pour les plus grands ! Et puis il y a trop de ventes. Il ne sert à rien de présenter des feuilles qui ont un intérêt relatif pendant le Salon du dessin, les amateurs n’ont aucune visibilité, ils sont noyés. Il faut les aider à faire une présélection ».
Nicolas Joly, expert, temporise : « Le marché du dessin est bien soutenu, avec une véritable passerelle entre dessin et peinture. Les amateurs aiment particulièrement les études, en lien avec un tableau. Par contre, il n’y a pas un grand renouvellement des collectionneurs depuis vingt-cinq ans, contrairement à la peinture. À la fin des années 1980-début des années 1990, il y a eu une explosion des prix, mais ces dernières années, le mouvement ne s’est pas amplifié, excepté pour les feuilles très rares. En revanche, pour les feuilles plus modestes, les prix ont baissé. »
Conséquence de ce tassement, les opérateurs multiplient les ventes de dessins modernes. « Le marché des dessins modernes se porte bien. Les derniers résultats de Londres étaient très dynamiques, avec de belles surprises. Il y a encore un certain choix », note Antoine Lorenceau, spécialiste. Pour ce second rendez-vous, inauguré l’an dernier, Christie’s met en lumière une œuvre sur carton de Toulouse-Lautrec, Dans les coulisses (est. 400 000 à 600 000 euros) ; un fusain d’Edgar Degas, Femme s’essuyant, estimé 250 000 à 350 000 euros, ainsi que Les Trois Masques (1922), de Fernand Léger, et Voiliers, gouache sur papier de Pierre Bonnard, estimés respectivement 100 000 à 150 000 euros. Piasa lui emboîte le pas et propose dans une seconde vente dédiée aux dessins modernes et contemporains, le 26 mars, une autre œuvre de Fernand Léger, La Lecture, portrait de Nadia, 1948, une étude de fleurs (est. 20 000 à 30 000 euros). Ader propose aussi quelques œuvres modernes, de Miró et Jean Cocteau notamment.
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Les maisons de ventes jouent leur partition
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Abonnez-vous dès 1 €Dessins anciens et du XIXe
le 26 mars à 15h30, Christie’s, 9, av. Matignon, 75008
Œuvres modernes sur papier
le 26 mars à 18h, Christie’s
Art moderne et contemporain
le 26 mars à 14h, Piasa, Drouot, 9, rue Drouot, 75009
Dessins et tableaux anciens
le 31 mars à 13h, Piasa, Drouot
Dessins anciens
le 27 mars à 14h, Millon & associés, Drouot
Tableaux et dessins anciens du XIXe
le 26 mars à 19h, Artcurial, 7, rond-point de Champs-Élysées, 75008
Dessins anciens et modernes
le 27 mars à 14h, Ader, Drouot
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°409 du 14 mars 2014, avec le titre suivant : Les maisons de ventes jouent leur partition