Les audaces du peintre sont à nouveau exposées à la Galerie Lelong, où ses impressions numériques de paysages et portraits font face à de plus classiques estampes.
PARIS - Hockney a toujours aimé se perdre sur les chemins de traverse, explorer, s’essayer à de nouveaux outils : photographies et photocollages, épreuves à tirages limités sur photocopieuses couleurs, dessins par fax ou sur ordinateur. C’est en 1990 qu’il découvre, pour la première fois, le travail sur ordinateur. Il se rend avec Richard Schmidt, son assistant et conseiller technique, à une conférence sur les outils informatiques. C’est là en 1990 qu’il commence à jouer avec ses nouveaux outils dont le programme Oasis de Mac. Il achète aussitôt un appareil photo numérique et se lance dans une série d’instantanés pris dans sa maison. « J’ai pris conscience que l’ordinateur me permettait de dessiner avec une imprimante. Parce qu’en fin de compte, qu’est-ce donc que ce dessin que l’on voit à l’écran ? Ce n’est qu’une image, une fois le dessin imprimé sur du papier », témoigne-t-il alors. Ce touche-à-tout génial s’abandonne avec jubilation à ses nouveaux outils qui lui offrent la possibilité de modifier à loisir la réalité et de retoucher sans vergogne ses images. Ce sont ces dessins sur ordinateur que la galerie Lelong propose de découvrir. « Drawing in a printed machine » est un titre emprunté à la galerie londonienne Annely Juda Fine Art, qui a présenté, pour la première fois, il y a trois ans, cette série. « C’est gonflé », s’amuse Jean Frémon de la galerie Lelong évoquant la quête perpétuelle de nouveauté de l’artiste et son étonnante rapidité d’exécution. Faire un dessin fouillé ne lui demande pas plus de cinq minutes. Il joue sur les couleurs, l’épaisseur des traits. À la fin de l’année 2010, la Fondation Pierre Bergé-Yves Saint Laurent pour l’art contemporain avait déjà montré ses dessins sur Ipad et Iphone.
Dans la campagne anglaise
Avec gourmandise, cet hédoniste croque, avec ses doigts, en quelques clics de souris, un paysage vibrant de vie. A Bigger Green Valley (2008), nous plonge dans son Yorkshire natal sur une petite route qui serpente au milieu de grands arbres épanouis. Place aux doux moutonnements de la campagne anglaise, à un univers intime, familier et sécurisant, loin des paysages sublimes, grandioses et presque violents du Grand Canyon exposé en 1999 au Centre Pompidou. À l’été 1997, Hockney se rend plusieurs semaines dans le Yorkshire au chevet de son galeriste et ami Jonathan Silver installé à Saltaire, à côté de Bradford, la ville natale du peintre. Plusieurs fois par semaine, il traverse en voiture ces paysages riants et fertiles. Il réalise alors une série de paysages qu’il commence sur place avant de les achever à Los Angeles. Infusées des couleurs flamboyantes du désert californien, ces plaines et collines paraissent exotiques, et presque extatiques. Des paysages en mouvement où l’on plonge – sensation vertigineuse – du haut d’une colline pour atterrir au milieu d’un patchwork de champs vert tendre. « Je crois quant à moi qu’il y a des gens qui voient le monde davantage par les yeux que par leurs facultés intellectuelles », écrivait David Hockney.
Ses proches, ses parents, ses amis, des objets : c’est le monde qui vit autour de lui que l’on retrouve dans ses dessins à l’ordinateur. Un matelot en vareuse bleu, béret bleu, pompon rouge fume une cigarette. Assis sur un tabouret, une main sur son genou, il s’abandonne dans une pose lascive. Roger Goulde, planté face à nous, lit son journal jambes croisées. Hockney nous montre ces personnages sans fard, tels qu’ils sont, tantôt gracieux et enjoués, tantôt gauches et fatigués. D’autres dessins mettent en scène deux personnages. Hockney sonde les liens qui les unissent, l’affection qu’ils se portent ou non. Les impressions numériques réalisées avec une imprimante à jet d’encre se vendent entre 13 000 et 35 000 euros. Le prix est fonction du nombre d’exemplaires des tirages (entre sept et trente), et du format des dessins. Au-rez-de-chaussé de la galerie, dans l’espace librairie, sont présentées de jolies estampes comme Ann combing her hair (1979). Ici, les prix s’échelonnent entre 1 000 et 15 000 euros. Mais pour ses piscines californiennes, très cotées, comptez plutôt autour de 50 000 euros. Le prix d’un petit éden, le sien.
Jusqu’au 2 mars 2013, Galerie Lelong, 2, rue de Téhéran 75008 Paris, tél 01 45 63 13 19. www.galerie-lelong.com
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Le petit monde émerveillé de David Hockney
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°384 du 1 février 2013, avec le titre suivant : Le petit monde émerveillé de David Hockney