foire

Le Maastricht nouveau est arrivé

L'ŒIL

Le 1 mars 2001 - 613 mots

Rendez-vous incontournable du « Who’s who » du marché de l’art, la Tefaf s’offre cette année un nouveau look. Désormais, on circule dans le Maastricht nouveau comme dans une ville. Les allées sont bordées d’édifices imitant la pierre et le visiteur flâne dans une atmosphère intimiste et familière. Un concept novateur que l’on doit à l’architecte néerlandais Tom Postma. Cette année, ils sont 197 exposants venus de 13 pays. « La Tefaf, c’est le nivellement par le haut », affirme l’antiquaire Alexis Kugel présent depuis 12 ans. Acquavella, de New York, vient avec Bonnard, Kandinsky et Picasso ; Caylus, de Madrid, avec un Murillo ; Nagy, de Londres, présente des œuvres de Klimt, Schiele et Kokoschka. Côté français, la participation s’est étoffée. Ils sont aujourd’hui une bonne vingtaine. Brame et Lorenceau viennent avec quelques grandes figures du symbolisme comme Gustave Moreau. Ainsi, la section peinture moderne, longtemps à la traîne, se positionne en force. Au début, le  maîtres anciens étaient omniprésents dans ce salon largement fréquenté par les Hollandais, les Belges et les Allemands. On y voit des œuvres rarement offertes sur le marché. Ainsi d’un paysage de 1594, de Jan Brueghel, chez Johny Van Haeften de Londres ou d‘un Portrait de Marie-Madeleine de Giovanni Francesco Caroto du XVIe chez Piero Corsini, de New York. Autre secteur très apprécié par les amateurs de l’Europe du Nord : la Haute Epoque. Chez Jan Dirven d’Anvers, une plaque en ivoire sculptée à Cologne vers 1170 et chez Mehringer de Munich une Vierge à l’Enfant de Tilman Riemenschneider (L’Œil n°515). Le succès du salon a ses revers. Il est immense et la visite se transforme en marathon éprouvant. « Ceux qui le peuvent ont intérêt à y passer plusieurs jours », conseille l’antiquaire Alexis Kugel. C’est vrai pour le « visiteur-touriste » comme pour le « visiteur-collectionneur ». Encore que ce dernier ait souvent une idée derrière la tête et n’examine pas l’ensemble des stands. On estime qu’un visiteur sur dix ne repart pas les mains vides. Comparé au nombre d’entrées (66 000 l’an dernier), c’est énorme. Et selon les marchands, le rapport qualité-prix y est presque toujours. Autre point fort de la manifestation, l’éventail des prix. A côté des conservateurs des musées, des institutionnels et des grands collectionneurs qui traquent le chef-d’œuvre, chacun peut faire son marché à sa mesure à Maastricht. « A côté de pièces majeures, je présente de petites choses de qualité à quelques milliers de francs, affirme Alexis Kugel. Ce serait impensable à la Biennale ». Sans que l’on puisse donner de chiffres, le cru 2000 s’est révélé d’un niveau excellent : Cazeau-la Béraudière, de Paris, a vendu un Max Ernst pour 1,3 M$ et Nico Delaive d’Amsterdam a cédé un Van Dongen de 1908, La Pudeur, à un collectionneur madrilène qui a choisi de l’installer dans sa salle de bains. La section manuscrits et livres rares, domaine difficile qui demande d’énormes connaissances, est très suivie des spécialistes. L’un d’eux a acquis l’an dernier, chez l’Allemand Heribert Tenschert, un manuscrit français enluminé pour 1,8 DM. Cette année, un autre manuscrit français va provoquer d’ardentes convoitises Le Codex Vogue de Guillaume de Machaut, datant de 1370, proposé à 7 M$ par l’Américain Bruce Ferrini. Quid du millésime 2001 ? Il se déroule certes dans un contexte moins favorable. Les acheteurs d’outre-Atlantique tirent le marché vers le haut, or l’économie américaine patine. Le mois dernier, Alan Greenspan, président de la Réserve Fédérale, estimait le ralentissement très spectaculaire, le taux de croissance étant proche de zéro. Faut-il s’en inquiéter ? Sans doute pas. « L’art est une tentation, déclare François Lorenceau, et le collectionneur y cède tôt ou tard ».

MAASTRICHT, Tefaf, 10-18 mars.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°524 du 1 mars 2001, avec le titre suivant : Le Maastricht nouveau est arrivé

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