Dispersion du contenu du château de Chiffrevast.
PARIS - À une époque où les meubles XVIIIe ne font plus recette, il est des ventes classiques qui continuent à faire rêver : celles du mobilier de châteaux français. C’est le fonds de commerce de certaines maisons de ventes parisiennes traditionnelles qui, à l’exemple de la SVV Beaussant-Lefèvre, allient clientèle et savoir-faire en la matière. Il y a quelques mois pourtant, ce duo de commissaires-priseurs s’était fait damer le pion par Christie’s pour la vente d’une Propriété d’Île-de-France (1). Les vendeurs s’étaient laissé séduire par des conditions financières avantageuses. Ils avaient été furieux d’apprendre ensuite que le lot phare de la vacation était une commode cataloguée « de style Transition » et estimée 3 000 euros par Christie’s. Le meuble était non seulement bien d’époque, mais il avait aussi été estampillé et référencé dans plusieurs ouvrages importants. Cela n’avait pas échappé à l’œil des professionnels du faubourg Saint-Honoré. Le prix obtenu, 60 000 euros, n’avait été dû qu’à l’acharnement de deux antiquaires montés l’un contre l’autre.
Brillamment meublé, le château de Chiffrevast, à Tamerville près de Valognes dans la Manche, fut acheté à la fin du XIXe siècle par la famille Bretel, des industriels spécialisés dans la production et l’exportation de beurre. Eugène Bretel, amateur d’art éclairé et fortuné, compléta son aménagement dans les années 1900. Jusqu’au décès de son descendant René Le Doux en 2006, le décor est resté en l’état. Trois salles de Drouot seront nécessaires pour exposer cet ensemble sur une durée exceptionnelle de trois jours. « Nous n’avons pas voulu faire de vente sur place, qui se justifie pour des projets moins importants avec des lots de qualité moyenne où il est utile de se laisser embarquer dans l’ambiance in situ pour obtenir quelques enchères de plus, commente Pierre-Yves Lefèvre, qui dirigera la vacation. À Chiffrevast, les objets ont été collectés il y a cent ou cent cinquante ans. Et certaines pépites devraient particulièrement bien se vendre à Drouot. » Les « pépites » sont trois tapisseries de Beauvais datant du début du XVIIIe et issues de la tenture de « L’Histoire du roi de Chine ». La plus célèbre, L’Audience du Prince, est estimée 300 000 euros. Un autre exemplaire de cette tapisserie, d’un format plus réduit à l’instar de celui conservé au Musée du Louvre, a été vendu aux enchères pour 455 000 dollars (360 000 euros) chez Christie’s à New York le 22 octobre 2003. Les Astronomes et Le Thé de la reine constituent deux autres pièces de cette tenture, estimées respectivement 200 000 et 50 000 euros. Une série de tableaux, sculptures, meubles et objets d’art, tous raisonnablement estimés, réjouiront sans doute nombre de marchands et d’amateurs. Telle cette paire de deux grandes statues chinoises en grès émaillé, représentant un boddhisatva debout sur des lotus et estimée 25 000 euros. Datée d’avril 1583, l’une porte l’inscription : « faite un jour faste de la fête de Qingming, la 11e année de l’Empereur Wanli ».
(1) vente du 4 juillet à Paris chez Christie’s. 597 lots vendus pour 1,2 million d’euros.
Vente le 23 octobre à Paris, Drouot- Richelieu, 9, rue Drouot, 75009 Paris, tél. 01 47 70 40 00 ; expositions publiques : les 20 et 21 octobre 11h-18h, le 22 octobre 11h-17h, le 23 octobre 11h-12h, www.beaussant- lefevre.auction.fr
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L’argent du beurre
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Abonnez-vous dès 1 €- Experts : Jacques Bacot (meubles et objets d’art), Gérard Auguier (tableaux), Thierry Portier (art d’Asie), Michel Vandermeersch (céramique) - Estimation : 1,8 million d’euros - Nombre de lots : 358
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°245 du 20 octobre 2006, avec le titre suivant : L’argent du beurre