La galerie Ratton-Hourdé, à Paris, rend hommage à la maternité à travers une sélection de vingt-huit sculptures.
PARIS - Après avoir organisé pendant treize ans des expositions thématiques, certaines restées dans les annales comme les trois réalisées autour du Congo à partir de la collection Lehuart, ou encore celle consacrée aux Fang au moment de l’ouverture du Musée du quai Branly, la galerie Ratton-Hourdé succombe cette année à un thème plutôt facile, celui de la maternité. Malgré tout, Philippe Ratton et Daniel Hourdé n’ont pas traité le sujet à la légère. Parmi les vingt-huit objets sélectionnés dans le stock de la galerie, certains sont importants, voire spectaculaires. C’est le cas de deux grandes maternités Urhobo du Nigeria, l’une couverte de latérite rouge, l’autre blanchie au kaolin. Dans l’une comme dans l’autre, la femme est représentée de manière presque virile, martiale et guerrière. Le sourire est carnassier et menaçant. Comme l’indique Daniel Hourdé dans le catalogue de l’exposition, la mère se pose en forteresse et en rempart. Une délicieuse sculpture Yombé, très classique mais particulièrement animée, offre quant à elle une face plus souriante de la maternité. Même plénitude souriante dans une cloche cérémonielle Kongo. Mais ces deux sculptures font figure d’exception.
La femme magnifiée
Dans la majorité des objets exposés, à l’image d’une grande statue Dogon, la femme apparaît souveraine, hiératique et puissante. À côté, les chérubins semblent ridiculisés. La très belle caryatide Luba du Congo, déjà présentée voilà six ans par la galerie et récemment rachetée, montre l’enfant minuscule, debout sur le genou d’une mère qu’il tète goulûment. La disproportion de taille entre la mère et l’enfant, lequel apparaît moins comme un nourrisson que comme un homme miniature, rappelle étrangement les décalages d’échelle dans la peinture médiévale occidentale. La femme est magnifiée alors que l’enfant paraît secondaire. Tellement secondaire que la galerie s’est autorisé quelques entorses au thème en montrant uniquement la féminité avec une lance Luba et une cuillère à jambes cérémonielle Dan. De leur côté, deux statuettes – Bambara du Mali et Dan de Côte-d’Ivoire – représentent des femmes sans progéniture. Mais les seins en obus, anormalement exagérés, suggèrent qu’elles ont récemment enfanté. Une autre phase de la maternité est traduite par une statuette Ashanti de Namibie, d’une douceur infinie, représentant une femme enceinte au ventre joliment arrondi et au visage épanoui. Un petit spécimen Yoruba reflète quant à lui un accouchement. La tête du nouveau-né qui sort de l’utérus semble cette fois étonnamment grande. L’exposition prend aussi le thème au sens large, en intégrant un couple de gazelles Tyiwara Bambara du Mali, la femelle portant son petit sur le dos. L’instinct de protection transcende les genres.
MATERNITÉ, du 12 juin au 31 juillet, galerie Ratton-Hourdé, 11, rue Bonaparte, 75006 Paris, tél. 01 46 33 32 02, du mardi au samedi 10h30-13h et 14h30-19h
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La mère, rempart de la vie
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°327 du 11 juin 2010, avec le titre suivant : La mère, rempart de la vie