ROME / ITALIE
Le tract des Brigades Rouges revendiquant l'enlèvement en mars 1978 de l'homme d'État italien Aldo Moro, assassiné quelques mois plus tard, a été vendu jeudi aux enchères pour 26 000 euros, en dépit de critiques sur l'opportunité de commercialiser un tel document.
La mise à prix était fixée à 600 euros, mais le prix est rapidement monté sur le site de la maison d'enchères romaine Bertolami Fine Art. Le tract à l'en-tête des « BRIGATE ROSSE », un feuillet de 33 cm sur 22 présentant de légères déchirures sur les bords, est surmonté du sigle de l'organisation, une étoile à cinq pointes dans un cercle. Le texte de 80 lignes commence par ces mots : « Jeudi 16 mars, une cellule armée des Brigades Rouges a enlevé et incarcéré dans une prison du peuple Aldo Moro, président de la Démocratie chrétienne » et deux fois chef du gouvernement (de 1963 à 1968 puis de 1974 à 1976). Cet exemplaire, dont il existe des copies dans des fonds d'archives publics, est « un texte dramatique de propagande rédigé et transmis aux organes de presse pour qu'ils révèlent les motivations de cet enlèvement », selon la maison d'enchères, qui n'a pas précisé son origine. Aldo Moro, enlevé le 16 mars 1978, avait été retrouvé mort 55 jours plus tard dans le coffre d'une Renault 4 en plein centre de Rome.
La vente de ce document historique a suscité des réactions indignées, notamment de la part de Mario Calabresi, ex-directeur du quotidien La Repubblica et fils d'un commissaire de police assassiné en 1972 par un autre groupe d'extrême gauche. « Ces pages ruissellent de sang, elles ne peuvent être achetées et vendues, devenir un objet de collection. Le seul endroit où elles peuvent être conservées, c'est dans les lieux de Mémoire pour nous rappeler la barbarie qu'était le terrorisme », a-t-il écrit sur Twitter. Le député du Parti démocrate (gauche) Filippo Senso a jugé « très triste » de vendre ou acheter « un souvenir aussi douloureux ».
Fondées en 1973 par le sociologue Renato Curcio et prônant l'idéologie marxiste-léniniste, les Brigades Rouges (BR) ont blessé ou tué des dizaines de magistrats, hommes politiques, journalistes ou industriels au cours des années 70. Mais l'Italie a compté dans ces « années de plomb » une myriade d'autres groupes terroristes d'extrême gauche, comme Lutte armée pour le communisme, Prolétaires combattants pour le communisme, Prolétaires armés pour le communisme, Parti communiste combattant, etc. Au cours des mêmes années 1970, les groupes armés d'extrême droite ont perpétré des assassinats et des attentats à la bombe qui ont fait des dizaines de morts et des centaines de blessés, comme le 2 août 1980 lorsque l'explosion d'une valise piégée avait fait 85 morts en gare de Bologne, l'attentat le plus meurtrier de cette époque.
Cet article a été publié par l'AFP le 27 janvier 2022.
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Italie : polémique après la vente aux enchères du tract ayant revendiqué l'enlèvement d'Aldo Moro
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