Lors d’un récent colloque organisé à l’université de Paris-Dauphine, ont été évoqués les travaux du groupe de travail présidé par M. Jean Léonnet pour proposer la réforme des ventes aux enchères. Il s’en est dégagé une entente cordiale, mais prudente, pour demander un désarmement fiscal et parafiscal.
PARIS - À l’observation sceptique de Me Guy Loudmer, qui rappelait que de commissions en études et en groupes de travail, un statu quo paralysant s’était maintenu en France depuis trente ans, faisaient écho les propos de Me Jacques Tajan rapportant que Peter Wilson lui avait un jour confié que l’idéal pour Sotheby’s et Christie’s serait que les choses restent en l’état en France. Me Hervé Poulain, membre du groupe de travail, rétorquait que ce dernier avait pour mission non d’étudier mais de proposer et de "légiférer", et qu’il s’y employait activement.
Au cours des échanges, il est apparu que le seul point sur lequel existe un consensus général entre commissaires-priseurs, "auctionneers", experts et marchands (à la notable exception des sociétés d’auteurs), est celui d’un désarmement fiscal et parafiscal. En ce qui concerne la TVA à l’importation, l’unanimité se fait pour demander à Bruxelles l’alignement du taux sur celui obtenu par les Britanniques (2,5 %). La généralisation du droit de suite envisagée par la Commission suscite les plus vives critiques, en particulier des Anglais. Le président du Syndicat national des antiquaires, M. Claude Blaizot, manifeste la même inquiétude sur les distorsions fiscales qu’il énumère – TVA, taxe sur les plus-values, contribution à la Maison des artistes, droit de suite, sans compter l’éventualité d’une taxe sur les ventes publiques (un taux de 1,5 % aurait été avancé) –, et dont il souligne qu’elles désavantagent la France par rapport à la Grande-Bretagne et l’Europe par rapport aux États-Unis.
En dehors de l’inquiétude fiscale, on a appris que serait sans doute instituée une autorité de marché, organisme indépendant qui délivrerait un agrément aux sociétés désireuses d’organiser des ventes aux enchères, pourrait s’assurer de la compétence, de la solvabilité, de la probité commerciale des postulants et, le cas échéant, les sanctionner en leur retirant son agrément. Il semble qu’ait été abandonnée l’idée d’imposer des capitaux propres très élevés (le rapport Aicardi avait articulé un chiffre de 100 millions de francs).
On a aussi noté que les dirigeants des sociétés de vente aux enchères – ou du moins certains d’entre eux – devraient justifier d’une qualification professionnelle pour l’exercice de leur activité. Évidemment, les parties en présence n’étaient pas unanimes sur la nature du diplôme, les possibilités d’équivalence, etc.
Pour conserver un rôle d’intermédiaire et éviter que les maisons de vente ne se substituent aux négociants, seraient prohibées les ventes d’objets, propriétés directes ou indirectes des sociétés de vente.
La question des garanties a également été abordée, en particulier par une réflexion sur les moyens de garantir l’acheteur et d’éviter que les éventuels recours ne soient détournés vers le vendeur. Aurait été évoquée l’idée que le recours contre le vendeur soit limité à une courte période, par exemple deux mois, ce qui serait le cas en Angleterre.
Au total, s’il y avait encore quelque grincements de dents, l’atmosphère était à une entente cordiale mais prudente. Reste à savoir si les grands argentiers nationaux et bruxellois s’y rallieront.
L’accès à la totalité de l’article est réservé à nos abonné(e)s
Entente cordiale face à Bruxelles
Déjà abonné(e) ?
Se connecterPas encore abonné(e) ?
Avec notre offre sans engagement,
• Accédez à tous les contenus du site
• Soutenez une rédaction indépendante
• Recevez la newsletter quotidienne
Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°25 du 1 mai 1996, avec le titre suivant : Entente cordiale face à Bruxelles