Foire & Salon

Salon

À Drawing Now, le dessin a bonne mine

Par Éléonore Thery · Le Journal des Arts

Le 29 mars 2017 - 731 mots

La 11e édition du salon présentait le dessin contemporain dans sa diversité, malgré un secteur « Émergence » en demi-teinte.

PARIS - Collages de vêtements d’enfant ou de résidus en plastique d’Hessie (galerie Arnaud Lefebvre), architectures de Keita Mori en fil de coton (Catherine Putman), perforations de Dominique De Beir (Galerie Jean Fournier), aquarelles de Gilles Aillaud (Loevenbruck), ombres de Sigurdur Arni Sigurdsson (Aline Vidal)… En poussant la porte du Carreau du Temple, le visiteur de Drawing Now Paris (du 22 au 26 mars) trouvait exposée toute la diversité du dessin contemporain, dont l’équipe des commissaires prend un plaisir certain à interroger les limites. Dans les allées voisinaient jeunes artistes et figures consacrées – ainsi Aurélie Nemours, Pierrette Bloch ou David Hockney mis en avant par le parcours « Master Now ».

À la Galerie Lelong, Etel Adnan – dont il fallait voir son grand format à l’encre de Chine (12 000 €) – côtoyait des papiers de David Nash au fusain et pastel (5 500 €) ou une variation sur la main d’Ernest Pignon-Ernest. Chaque artiste a trouvé acquéreur. « Les ventes démarrent lentement, les visiteurs aiment prendre leur temps et attendre le week-end pour confirmer leurs achats », précisait la galeriste. La lenteur était aussi appriéciée par Véronique Huttman (Art Bärtschi & Cie, Genève), venue pour la première fois : « Dans cette foire qui a la taille d’un salon, les visiteurs prennent le temps et portent une attention poussée aux œuvres » Sur son stand, un quadriptyque de Giuseppe Penone dialoguait avec les œuvres de Javier Pérez, goutte à goutte d’aquarelle et gouache. Valérie Bach avait de son côté accroché les feuilles de Douglas White, empreintes réalisées à l’aide de l’encre de poulpes posés à même le papier.

Humour féroce et rebuts
Chez Suzanne Tarasieve, le visiteur pouvait actionner à la manivelle les paysages ciselés d’Eva Jospin, dont une lumière rehaussait la dimension théâtrale. Sur le stand d’Anne Barrault, un grand mur était consacré aux dessins riches de correspondances visuelles de Guillaume Pinard, un ensemble qui a fait florès. « C’est la peinture qui m’a donné envie de dessiner, elle constitue un travail préparatoire pour mes dessins », expliquait l’artiste, à rebours des pratiques habituelles. À la Galerie Martel étaient présentés les acryliques sur carton d’Éric Lambé, les portraits glacials de dictateurs par Nicolas de Crécy et les aquarelles de Brecht Evens. La quasi-intégralité du stand a été vendue, avec des prix allant jusqu’à plus de 30 000 euros pour une planche de Maus par Art Spiegelman ou une couverture du New Yorker signée Chris Ware.

Chez Georges-Philippe & Nathalie Vallois, la BD a moins porté chance : les ventes étaient clairsemées pour le beau focus sur le dernier album de Winshluss. Isabelle Gounod présentait quant à elle différents formats de Glen Baxter, dont l’humour féroce décortique les mécanismes du marché de l’art. Son coup de projecteur sur le jeune Lenny Rébéré a été prisé. Récompensé par le prix Drawing Now 2017, Lionel Sabatté exposait à la Galerie C (Neufchâtel) ses œuvres réalisées à partir de rebuts : traces forgées sur des matières grasses de cuisine, silhouettes en poussière de métro ou projections de béton sur papier ; proposées de 1 000 à 5 000 euros, les feuilles ont pour la plupart été vendues. Sur ce stand, on découvrait le travail de Jérémie Bennequin, qui efface page par page l’œuvre de Proust et en présente le résultat fantomatique accompagné de ses résidus de gomme (dès 1 000 €).

Le secteur « Émergence » était en revanche quelque peu décevant. À retenir, les interventions de Marta Caradec (galerie Réjane Louin, Locquirec) sur des cartes géographiques du XIXe siècle, rehaussées au feutre de couleur et additionnées de collages. La galeriste expliquait : « Marta est passée de travaux purement graphiques à la mise en avant de problématiques plus sociétales, comme celle des limites de l’Europe », une Europe recouverte de minuscules fragments de billets de banque. Plusieurs de ces œuvres, proposées de 1700 à 3000 euros, ont été cédées.

Backslash consacrait son stand aux scènes de fête de Thomas Lévy-Lasne, élaborées avec plusieurs passages d’aquarelle, et accrochées sur leurs propres agrandissements. Hors les murs, Jochen Gerner, lauréat du prix l’an dernier (et nouveau collaborateur du JdA), montrait chez Christie’s sa série réalisée à partir du catalogue Ikea et dont la technique de recouvrement faisait naître une succession de formes géométriques.

Légende photo

Marta Caradec, Baie de Santander, 2012, gouache et encre sur carte, 75 x 105,5 cm © courtesy galerie Réjane Louin

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°476 du 31 mars 2017, avec le titre suivant : À Drawing Now, le dessin a bonne mine

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