Lié à l’artiste yougoslave depuis près de trente ans, Alain Margaron présente les dernières œuvres de Dado, artiste encore peu considéré par les institutions.
Miodrag Djuric, dit Dado, avait huit ans (né en 1933, à Cetinje dans l’actuel Monténégro), lorsqu’en 1941, en pleine Seconde Guerre mondiale, il découvrit des pendus en poussant la porte de son école. Cela laisse des traces. D’autant plus vives que le traumatisme va resurgir et les blessures se rouvrir au début des années 1990 avec la guerre en Yougoslavie. Rien d’étonnant à ce que quelques années plus tard, l’artiste, qui avait souvent donné une priorité au bleu, se tourne vers le rouge sang et l’éclatement des formes.
C’est cette période, de 2000 jusqu’à sa mort en 2010 (près de Paris, où il était arrivé en 1956), mais surtout jusqu’en 2005, car il peignait peu les dernières années, qu’Alain Margaron a décidé d’exposer. Et pour bien montrer la rupture de style, le galeriste confronte ces années, ponctuées par un autoportrait derrière une palette, l’un de ses derniers tableaux, à des toiles et dessins plus anciens de différentes époques (un bon tiers sur la quarantaine présentée au total), histoire de rappeler le parcours de Dado.
La plupart des œuvres ici sélectionnées correspondant aux dernières années de sa vie n’ont jamais été montrées à Paris. Elles n’ont même été exposées qu’une seule fois aux Abattoirs de Toulouse, au printemps 2002, à l’occasion de l’exposition « Dado, Réquichot : la guerre des nerfs ».
C’est aussi une épreuve de force avec son travail précédent et un combat contre lui-même qu’il commence à livrer, sous l’égide du patron des peintres, saint Luc (d’où le titre de l’expo « La peinture selon saint Luc » et de certaines œuvres Saint Luc,), au moment même où il travaillait sur des fresques dans une petite chapelle romane désaffectée près de Gisors.
D’accès moins facile, assez dures, à l’exemple de L’École de Precsillia, l’un des grands draps présenté ici, ces œuvres sont, elles aussi, importantes à plus d’un titre. D’une part, « elles témoignent de la façon dont Dado casse son système », précise le galeriste. Et d’autre part, derrière leur force avec collages de papiers et de cartons triturés, découpés, déchirés, ou même avec l’ajout d’un oiseau empaillé, conjugués à la peinture, elles affirment le formidable souci de composition qui les structure. Ce qui apparaît ici comme débridé, voire exalté, se révèle en fait, avec un peu d’attention, le résultat d’une conception très précise et élaborée. « Tout est pensé au millimètre », indique Alain Margaron, grand connaisseur de l’œuvre, qui a rencontré l’artiste en 1993, l’a régulièrement fréquenté et l’a déjà exposé sept fois dans sa galerie.
Il explique très bien pourquoi les prix, qui vont de 2 000 euros pour un dessin de 1959 à 80 000 euros pour une peinture de 1960 (et 45 000 euros pour le plus grand drap) sont très abordables. « Assez difficile, l’œuvre de Dado est mal appréhendée et l’institution ne s’y intéresse pour l’instant que très peu. »À bon entendeur…
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Dado, la peinture en lambeaux
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°534 du 29 novembre 2019, avec le titre suivant : Dado, la peinture en lambeaux