Avant que les sismogrammes du marché ne frémissent sous les coups des collectionneurs arabes, de nombreux regards étaient tournés du côté de l’Iran. Jusqu’à la révolution islamique de 1979, les collectionneurs iraniens étaient très actifs, sur le terrain de l’art islamique mais aussi, chose inédite dans cette région, sur celui de l’art contemporain.
PARIS - Plusieurs collections constituées en Iran dans les années 1970 font référence. Dans le domaine des sceaux sassanides et des bronzes du Louristan, la collection Mohsen Foroughi est régulièrement citée, de même que celles d’Abolala Soudavar et de Hashem Khosrovani pour les miniatures persanes et indiennes. Malgré la révolution islamique, les collectionneurs iraniens n’ont pas déserté les salles de vente, même si leur appétit est moins visible que par le passé. Entre 1989 et 1993, Nasser David Khalili, un ancien marchand iranien établi à Londres, était une figure active du circuit. Ce collectionneur, qu’on a longtemps suspecté d’être financé par le sultan de Brunei, a acheté de l’art islamique avant de céder à l’attrait de l’Extrême-Orient. L’inventaire de sa collection publiée en de luxueux catalogues brasse un champ large où le moyen côtoie l’exceptionnel.
L’Iran est surtout l’un des rares États de la région avec Israël à défendre l’art contemporain. La reine Farah Diba a ainsi inauguré en 1977 le Musée d’art contemporain de Téhéran construit par son cousin, l’architecte Kamran Diba. La collection de cette institution comprend une centaine de pièces embrassant surtout l’art américain d’après guerre, de Jackson Pollock à Andy Warhol en passant par Cy Twombly. “Au début, nous étions supposés faire un musée dédié aux artistes iraniens contemporains. Grâce à l’argent dégagé par le pétrole, nous avons pu acheter de grands artistes étrangers. J’avais alors un budget de 4 millions de dollars”, rappelle Kamran Diba. Plusieurs œuvres, notamment le Pollock, furent acquises auprès du marchand suisse Ernst Beyeler. Malgré la révolution, la collection est restée intacte à l’exception d’un De Kooning échangé contre un manuscrit de Shah Name safavide.
“C’était une opération financière lucrative pour les Américains. Le manuscrit de Shah Name avait été proposé à Khalili pour 4,5 millions de livres sterling. Le tableau de De Kooning valait 20 millions de dollars. Les marchands ont fait une belle affaire. Je me demande encore comment le musée a pu accepter une telle transaction, ne serait-ce que sur un plan commercial”, s’étonne Kamran Diba. Le Musée de Téhéran reste actif aujourd’hui, mais son budget d’acquisition annuel de 100 000 dollars ne lui permet pas de prétendre aux grands noms de l’art contemporain occidental. À défaut des pointures, il continue à enrichir le fond d’artistes iraniens.
Par ailleurs, Kamran Diba est un amateur qu’on croise souvent à la Foire de Bâle. Sa collection, constituée d’artistes américains comme Julian Schnabel et Donald Baechler, avait été entrevue lors de l’exposition “Passions privées” au Musée d’art moderne de la Ville de Paris en 1997.
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En Iran, une tradition plus ancienne
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°176 du 12 septembre 2003, avec le titre suivant : En Iran, une tradition plus ancienne