La foire « off » de Bâle accompagne les jeunes galeries en leur permettant de s’essayer au marché avec audace.
Bâle. C’est en 1996 que Liste, la petite foire « off » de Bâle qui fait beaucoup parler d’elle, a vu le jour. « À l’époque, Art Basel était un bastion où il n’y avait pas de place pour les jeunes galeries. Il a donc fallu créer une autre foire pour pouvoir faire des découvertes », rappelle Florence Bonnefous, fondatrice d’Air de Paris, qui a participé aux premières éditions de Liste avant d’entrer à Art Basel. L’initiative revient alors aux galeristes zurichois Peter Kilchmann et Eva Presenhuber – laquelle est depuis entrée dans le comité de sélection d’Art Basel –, qui font appel au commisaire bâlois Peter Bläuer pour lancer la manifestation. L’ancienne brasserie Warteck, avec son espace labyrinthique, est réquisitionné. La condition pour y participer : être une galerie âgée de moins de 5 ans et travailler avec des artistes de moins de 40 ans.
Parmi les 36 participants de la première édition, on trouve Anne de Villepoix (Paris), David Zwirner (New York) ou neugerriemschneider (Berlin). Emmanuel Perrotin (Paris) passe aussi par là les premières années, lui qui prend alors ses repas au fast-food, n’ayant pas les moyens de suivre le train de vie des autres galeristes. Ce qui ne manquera pas de faire jaser, certains pensant qu’il allait conclure des affaires en douce avec de gros collectionneurs.
« Depuis le début, Liste est un tremplin pour Art Basel et pour toutes les autres grandes foires dans le monde. Quand une galerie fait Liste, elles est soudainement invitée ailleurs », souligne Peter Bläuer. Nombreuses sont en effet les enseignes à être passées par ce salon avant d’entrer dans la sacro-sainte foire, à l’instar de gb agency et de Jocelyn Wolff qui ont fait Liste avant d’intégrer les sections « Statements » et « Feature » d’Art Basel, elles-mêmes préludes à l’entrée dans la section principale, « Galleries ». « Liste est une foire où l’on se construit, avant d’entrer à Art Basel et d’être confronté violemment à ce qu’est le marché. Liste est un moment incubateur nécessaire. Cela permet de se constituer un réseau que l’on consolide et que l’on amplifie ensuite à Art Basel », confie Jocelyn Wolff. « Malgré un marché de l’art tentaculaire, ajoute Florence Bonnefous, et bien qu’Art Basel ait entre-temps évolué et accueille aujourd’hui de jeunes galeries, Liste a su se transformer et préserver sa fraîcheur. Liste n’est pas seulement la petite sœur de Bâle. Certaines galeries font les deux foires en parallèle. Des projets peuvent trouver là une place qu’ils n’ont pas dans le “grand” marché de l’art, par la complexité des œuvres proposées. »
Une vraie « foire satellite »
Cette année, on recense 79 participants venus de 34 pays différents. Soit deux fois plus de galeries que lors de l’année de lancement. « Cependant, précise Peter Bläuer, nous ne souhaitons pas nous agrandir, car ce qui prime pour nous est la qualité des propositions, et accueillir plus de galeries ne signifie pas forcément devenir une meilleure foire. » Parmi les nouveaux participants figure le jeune galeriste français Antoine Levi. On trouve également Joseph Tang (Paris) avec un solo show de Carlos Reyes. Trois nouvelles pièces soumises à l’action du vent questionnent la dématérialisation de la sculpture. Clearing (New York, Bruxelles) opte aussi pour une monographie, consacrée au jeune Américain encore peu connu en Europe Zak Kitnick, dont le travail vient d’être acheté par le Mamco de Genève. Sont présentées de nouvelles pièces de sa série inspirée par les recherches menées par la compagnie de téléphone Bell pour trouver un clavier à touches optimal. Olivier Babin (Clearing) insiste : « Liste est une foire satellite au vrai sens du terme et elle est le point de passage obligé vers la planète “Basel”. »
D’autres galeries qui savent rencontrer des collectionneurs et des commissaires pointus proposent des regroupements d’artistes très pensés. Clin d’œil à notre plus vieil ancêtre humain connu, la galerie chinoise MadeIn rassemble les installations de Miao Ying et les vidéos de Shen Xin et de Wang Newone sur un stand intitulé « Lucy ». Mor Charpentier (Paris) propose quant à elle une réflexion sur le portrait et sa disparition à travers des approches postcoloniales. Philippe Charpentier indique : « Liste est la seule foire “off” que nous faisons. Elle nous donne une très grande visibilité auprès de collectionneurs internationaux très importants. C’est un détecteur de talents à l’échelle mondiale. » Et Grey Noise (Dubaï) de renchérir : « Liste est pour nous plus qu’une foire. Cela nous donne une visibilité en Europe et même au-delà. » La galerie fait dialoguer deux artistes pakistanais, Lala Rukh et Fahd Burki, au langage formel minimal. Enfin, Liste « apporte un réseau solide de galeries partenaires », précise Crèvecœur, qui montre des peintures acidulées de Louise Sartor, très remarquée lors de la dernière édition de Paris Internationale. On ne s’étonnera pas d’y voir des stands très politiques, comme celui de Jaqueline Martins (São Paulo) avec des œuvres de Daniel de Paula questionnant le pouvoir d’influence des divers réseaux.
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Liste, tremplin d’Art Basel
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°481 du 9 juin 2017, avec le titre suivant : Liste, tremplin d’Art Basel