PARIS - Figure oubliée du grand public, Madeleine Vionnet (1876-1975) est à l’affiche du Musée des Arts décoratifs pour une lumineuse rétrospective. Doté du plus important fonds public de l’œuvre de la couturière, le musée parisien a entrepris, il y a deux ans, une large campagne de restauration de ses modèles, et ce grâce au soutien de Natixis, mécène de l’exposition.
En 1952, Madeleine Vionnet avait fait don à l’Union française des arts du costume d’un riche ensemble (122 robes, 750 toiles patrons, 75 albums photographiques…) dont les plus belles pièces sont ici réunies. Dans un parcours chronologique et didactique se dessine le visage d’une artiste visionnaire et cérébrale, dont les créations naissent de l’alliance de quatre éléments fondamentaux : les proportions, l’équilibre, le mouvement et la vérité. Dès 1921, à l’âge de vingt-cinq ans, Madeleine Vionnet fait ses armes auprès des plus grands de l’époque, les sœurs Callot et surtout Jacques Doucet. Lequel finit par se séparer de la jeune créatrice qu’il avait pourtant engagée pour rajeunir sa marque. Un signe. Inspirée par les préceptes puristes définis par Amédée Ozenfant et Le Corbusier en 1918, mais également passionnée par la Grèce antique, Vionnet jette le corset aux orties, et façonne le tissu telle une architecte pour aboutir à un classicisme ultime. Sa maîtrise de la géométrie spatiale donne naissance à des modèles d’un cartésianisme désarmant, telle la Robe 4 mouchoirs (1920), assemblage astucieux de quatre pièces de tissus identiques. De 1918 à 1939, le succès ne s’est jamais démenti, porté par le cadre luxueux de la maison de couture sise dans un hôtel particulier de l’avenue Montaigne. En décalage avec son temps, Madeleine Vionnet se souciait du confort de ses employés. Sa marque s’est éteinte avec son retrait de la profession, à la différence des grands couturiers de l’après-guerre comme Christian Dior. Pionnière, Madeleine Vionnet l’était aussi dans le respect du droit d’auteur : la contrefaçon vestimentaire faisant rage, la couturière a obtenu la fondation de l’Association pour la défense des arts plastiques et appliqués en 1922. Trois albums de photographies répertoriant tous ses modèles illustrent ainsi la manière dont ses créations étaient protégées par un dépôt auprès des autorités. Aux commandes de la scénographie, la designer Andrée Putman, dont on connaît le penchant pour la période Art déco. Sa mise en scène ne dépareille pas des habituelles présentations temporaires du musée, et malgré un éclairage limité à une moyenne de 50 lux par heure par souci de conservation, l’ambiance feutrée prend vie grâce à l’animation discrète des cartels numériques, dispensant tour à tour notice, photographies et dessins.
MADELEINE VIONNET, PURISTE DE LA MODE, jusqu’au 31 janvier 2010, Musée des Arts décoratifs, 107, rue de Rivoli, 75001 Paris, tél. 01 44 55 57 50, www.lesartsdecoratifs.fr, tlj sauf lundi 11h-18h, 10h-18h le weekend et 11h-21h le jeudi. Catalogue, édité par le musée, 304 p., 360 ill., 55 euros, ISBN 978-2-916914-13-8.
L’accès à la totalité de l’article est réservé à nos abonné(e)s
Vionnet ou la pureté de la ligne
Déjà abonné(e) ?
Se connecterPas encore abonné(e) ?
Avec notre offre sans engagement,
• Accédez à tous les contenus du site
• Soutenez une rédaction indépendante
• Recevez la newsletter quotidienne
Abonnez-vous dès 1 €MADELEINE VIONNET
Commissaire : Pamela Golbin, conservatrice en chef des collections de mode et textile aux Arts décoratifs.
Œuvres : 130 modèles, auxquels s’ajoutent quelques aquarelles, photographies et vidéos
Scénographie : Andrée Putman
Mécénat : Natixis
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°309 du 18 septembre 2009, avec le titre suivant : Vionnet ou la pureté de la ligne