Pour son cinquième anniversaire, la Fondation présente une profusion d’œuvres historiques et contemporaines de sa collection, malheureusement un peu à l’étroit.
L'ISLE-SUR-SORGUE - « Lorsque mon mari et moi avons créé la Fondation Villa Datris, le but n’était pas de constituer une collection. Notre idée était de faire des expositions et de montrer beaucoup d’œuvres », rappelle Danièle Kapel-Marcovici. Seulement voila, avec le temps et à raison d’une quinzaine d’acquisitions en moyenne par an, le couple s’est un jour aperçu qu’il avait une vraie collection, dont une partie est actuellement montrée pour fêter le cinquième anniversaire de la Villa. Ils avaient déjà fait ainsi pour leur collection personnelle, commencée au début des années 2000. Et Danièle Kapel-Marcovici a reproduit la même approche dès 2006 pour la collection d’entreprise du Groupe Raja dont elle est PDG.
C’est en 2010 que germe le projet de la Villa Datris. Danièle Kapel-Marcovici, enthousiaste et engagée, et son mari Tristan Fourtine, architecte, tous deux passionnés par l’art, les artistes et la Provence, achètent alors une belle demeure provençale datée de 1870, à L’Isle-sur-la-Sorgue. Si le nom évoque une mythologie méditerranéenne oubliée, il n’en est rien. Datris correspond simplement aux premières syllabes de Danièle et Tristan. De même que le nom du Groupe Raja reprenait le début des prénoms Rachel (la mère de Danièle) et Janine (sa tante). Comme une tradition. Ayant pour vocation de se consacrer à la sculpture contemporaine plutôt à tendance abstraite, la villa est inaugurée le 2 juin 2011 avec « Sculptures plurielles ». Suivront, chaque été, « Mouvement et lumière » (2012), « Sculptrices » (2013), « Sculpture du Sud » (2014) et « Archi-Sculpture. Hommage à Tristan Fourtine », décédé entre-temps en janvier 2013. Cette année « Sculpture en partage » vient rappeler la philosophie du projet, pensé à la fois comme engagement sociétal, démocratisation de l’art (gratuité pour les visiteurs), soutien aux jeunes artistes, partage avec les publics, comme l’indique le titre.
Une surabondance dommageable
Mais cette médaille de la générosité a son revers, lifté et imparable : la sensation de surcharge. Et qui trop embrasse, mal étreint… La preuve en est donnée dès l’entrée, avec le petit jardin devant la maison qui accueille pas moins de sept œuvres ! La première, l’installation au sol Mare Nostrum de Jean Denant – une carte de la méditerranée en inox poli avec effet miroir, entourée de pelouse synthétique – mesure déjà à elle seule 4,30 mètres sur 2 mètres, juste au pied du perron rendu difficile d’accès. Juste à côté l’imposant Arbrabra, un arbre en pneu et métal d’Anne Claverie masque en grande partie le Metamophorsis Blue Ascendant de Rafaël Barrios. L’effet est d’autant plus dommage qu’à l’exemple des Virus de la Révolution de Rym Karoui – huit éléments viraux en résine portant chacun différentes mentions, « Help », « Dégage », « Freedom »… liées au printemps arabe – les œuvres sont plutôt bien choisies. Car aussi belle soit-elle, la maison est une maison de ville et son jardin n’est pas un immense parc où il n’est pas si aisé d’y présenter autant d’œuvres, sans que celles-ci ne soient trop gênées aux entournures. Cette impression de saturation se retrouve malheureusement aussi à l’intérieur, dans la dizaine de salles réparties sur quatre niveaux et chacune consacrée à un thème : « L’art optique », « L’art lumino-cinétique », ou plus énigmatique « Le Lubéron, terre de l’art cinétique ? », etc.
Les œuvres sont dans l’ensemble de belle qualité et ont l’avantage, compte tenu de l’exiguïté des espaces, d’être de petits ou moyens formats et souvent murales. Avec des frontières entre les différentes thématiques assez floues et poreuses, l’ensemble n’est pas d’une rigueur conceptuelle à toute épreuve. Mais ce n’est pas son but non plus et si l’on se résout à se laisser porter, le parcours se révèle agréable. Il permet de voir de belles pièces de Carlos Cruz-Diez, Jésus- Rafael Soto ou François Morellet et de mêler ces artistes historiques à des contemporains confirmés (Joana Vasconcelos, Carmen Perrin, Miguel Chevalier, Jaume Plensa), de plus jeunes (Alexis Hayère, Laurent Perbos) ou des artistes de la région (Henri-François Dumont, André Pharel). « Ici ce n’est pas l’auberge espagnole, mais l’auberge de L’Isle-sur-la-Sorgue », indique avec acuité Daniel Kapel-Marcovici. On ne saurait mieux dire.
Scénographie : Laure Dezeuze et Jules Fourtine
Nombre d’œuvres : une centaine
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Villa Datris, auberge artistique
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Abonnez-vous dès 1 €Jusqu’au 1er novembre à la Villa Datris, 7, avenue des quatre-otages, 84 800 L’Isle-sur-la-Sorgue
tél. 04 90 95 23 70
www.villadatris.com
En mai-juin et septembre-octobre, jeudi-lundi 11h-13h et 14h-18h. En juillet-août tlj, sauf le mardi 11h-13h et 14h-19h et dimanche sans interruption. Entrée libre.
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°458 du 27 mai 2016, avec le titre suivant : Villa Datris, auberge artistique