À l’origine de l’exposition « D’un soleil à l’autre », une commémoration : celle du cinquantième anniversaire des premiers pas de l’homme sur la Lune.
« La conquête spatiale a nourri un imaginaire collectif très important », explique Charles Carcopino, son commissaire. Un imaginaire d’autant plus foisonnant que l’Espace se représente difficilement : trop loin, trop silencieux, bref, situé hors de portée des perceptions humaines, il demande à être interprété, mis en forme, presque « décodé ». À rebours d’autres événements sur le même thème – dont « Gravité zéro », l’an dernier aux Abattoirs à Toulouse –, l’exposition délaisse la science-fiction et son imaginaire social et symbolique pour mieux cerner la façon dont la création la plus récente peut rendre sensible, palpable, ce que l’espace offre d’a priori irréductible à toute représentation : sa matière et ses phénomènes physiques. « D’un soleil à l’autre » mise à ce titre sur un corpus resserré – une dizaine d’artistes et de collectifs seulement – et sur une scénographie habile, qui tire tout le parti des masses de béton et des bassins de l’impressionnante base sous-marine. Plongées dans l’obscurité, les œuvres présentées donnent à voir et à entendre toutes sortes de phénomènes, le plus souvent à partir de données collectées in situ, ou auprès de chercheurs et d’institutions : vortex et hydrogène chez Evelina Domnitch et Dmitry Gelfand, environnements célestes et coucher de soleil martien chez Félicie d’Estienne d’Orves, rayons cosmiques chez LAb[au], fréquences solaires chez Stéphane Thidet, etc. Démonstration convaincante des liens fertiles entre arts, sciences et technologies, l’exposition parvient en cela à communiquer le vertige et l’ivresse de la conquête spatiale.
Cet article a été publié dans L'ŒIL n°723 du 1 mai 2019, avec le titre suivant : Vertiges de l’Espace