À l’occasion de l’entrée de la Bulgarie dans l’Union européenne, le Musée Jacquemart-André à Paris accueille les trésors des Thraces.
Paris - « Son char est orné d’or / et d’argent finement travaillés / Il est venu avec des armes d’or / prodigieuses, une merveille ! / Dignes d’être portées non par / des mortels, mais par des immortels. »
Les splendeurs chantées par Homère dans L’Illiade à l’évocation du roi thrace Rhesos sortent du domaine du mythe une fois traversée la reconstitution du temple sous tumulus qui orne l’entrée de l’exposition « L’or des Thraces », organisée au Musée Jacquemart-André, à Paris. À l’occasion de l’entrée de la Bulgarie dans l’Union européenne, sont réunis des trésors archéologiques de la civilisation thrace, présente dans la péninsule balkanique entre le Danube et la mer Égée depuis le IIe millénaire av. J.-C. jusqu’aux invasions barbares, aux premiers siècles de notre ère. La manifestation comprend une centaine de pièces prêtées par les principaux musées bulgares. Issus de découvertes archéologiques fortuites réalisées ces quarante dernières années ou de fouilles systématiquement entreprises depuis la chute du régime communiste, les quatre trésors reconstitués déploient bijoux, vaisselle d’apparat, pièces de harnachement et d’armement. Alors que la première salle, avec des objets de l’âge de bronze – IIIe millénaire av. J.-C. –, montre l’ancienneté du savoir-faire métallurgiste des Thraces, les sections suivantes s’attachent aux dynasties royales, entre le VIe et le IIIe siècle av. J.-C. Le trésor de Borovo se compose d’un service de pièces en argent partiellement dorées. Comme en atteste l’ensemble des pièces présentées, l’iconographie et les techniques grecques ont exercé une influence notable sur cet art. Les rhytons à protomé de cheval, de taureau ou de sphinx, d’un grand réalisme, en sont la meilleure illustration.
Peuple orfèvre
La plus grande découverte archéologique de Bulgarie occupe, avec ses 20 kg de métal précieux, l’espace suivant. Vases et cruches du trésor de Rogozen témoignent de l’exceptionnelle qualité d’orfèvre de ce peuple. La fonction utilitaire s’allie là aussi à la richesse décorative, déclinant bestiaire fantastique, motifs végétaux et figures géométriques. Plus loin, le trésor de Letnitsa et les pièces mises au jour en 2004 révèlent la dualité d’une nation guerrière soucieuse de raffinement artistique. Appliques de harnachement, casques en bronze et paire de jambières sont richement ornés. Pour clore le parcours, des objets d’or destinés au culte dévoilent leur magnificence avec des rhytons zoomorphes et anthropomorphes d’une grande beauté. La scénographie a le mérite, outre qu’elle rappelle le contexte d’origine des pièces – l’intérieur d’un tumulus sert ainsi d’écrin aux bijoux trouvés dans la « Vallée des Rois thraces », un site riche en vestiges –, de les mettre particulièrement en valeur. Les grandes vitrines centrales autorisent un regard panoramique, tandis que l’éclairage très focalisé met en exergue l’éclat et le relief des objets.
Le Musée Jacquemart-André élargit ici avec bonheur son champ d’action, conjuguant une mise en scène spectaculaire et un propos scientifique porté par les panneaux explicatifs. Il confirme par là même son intérêt pour les découvertes archéologiques par le biais de l’Institut de France.
- Commissaires : Valeria Fol, membre de l’Institut de thracologie, Bulgarie ; Sveta Tsaneva, directeur du laboratoire de conservation et de restauration auprès du Musée historique national de Sofia, Bulgarie ; Nicolas Sainte Fare Garnot, directeur du Musée Jacquemart-André - Nombre de salles : 6
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Une caverne d’Ali Baba
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Abonnez-vous dès 1 €Jusqu’au 31 janvier 2007, Musée Jacquemart-André, 158, bd Haussmann, 75008 Paris, tél. 01 45 62 11 59, www.musee-jacquemart-andre.com, tlj 10h-18h, le lundi jusqu’à 21h30. Catalogue, 192 p., éd. Snoeck, 39 euros, ISBN 90-5349-622-X.
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°247 du 17 novembre 2006, avec le titre suivant : Une caverne d’Ali Baba