Un trait entre le dessin ancien et contemporain

Au Frac Haute-Normandie, une centaine de dessins anciens et contemporains, issus de trois collections normandes (le MuMa Le Havre, le Musée des beaux-arts de Rouen et le Frac Haute-Normandie) dialoguent sans hiérarchie sur une même ligne temporelle et sensible qui vient dessiner des pratiques communes à travers les siècles. Ici de 1580 à 2014. Les uns sont dépoussiérés, les autres trouvent une filiation. Certains rapprochements sont évidents comme pour les dessins techniques, anatomiques ou botaniques. Les études préparatoires arides du sculpteur animalier Antoine-Louis Barye côtoient celles tout aussi précises de Mark Dion en vue d’une œuvre. Ici la parenté est claire, revendiquée autant que dans le découpage, le collage ou la primauté du fond blanc. Pratique pragmatique pour les anciens érigée en principe par les contemporains. D’autres rapprochements sont plus audacieux, plus instinctifs aussi. Comme l’esquisse de Wolf Vostell pour sa performance à la Biennale de Venise 1983 et l’étude d’un plafond par Il Volterrano : le crayon maintes fois passé rend quasiment illisibles les deux esquisses. Encore plus culotté est le parallèle entre la dilution de la couleur à l’eau de Javel pratiquée par Michel Blazy et celle de l’aquarelle des croquis du paysagiste Henri-Edmond Cross. Culotté mais jamais hasardeux. Le propos d’une grande rigueur, fruit de huit mois de recherche dans les collections, est tenu de bout en bout jusque dans l’exploration des frontières de l’œuvre sur papier qui apparaît en filigrane : fusain sur toile de peintre par Samuel Martin (Extérieur nuit, 2013) ou photographie imprimée sur papier dessin de Benoît Pierre (Soldat n˚ 1).