Tout Marc Chagall

Un événement très attendu des Bruxellois qui n’ont pas connu pareille célébration du peintre russe depuis 1955. Un enthousiasme local qui devrait légitimement s’étendre aux pays voisins, notamment à la France, qui a célébré l’artiste à plusieurs reprises ces dernières années, mais jamais avec l’ambition de couvrir la totalité de sa carrière. Des premières peintures, en 1908, jusqu’aux dernières œuvres monumentales des années 1980, la période explorée est presque aussi étendue que peut l’être l’aventure picturale du XXe siècle. Celle-ci, trop souvent résumée aux avant-gardes, se voit opposer avec Chagall une alternative originale.

Arrivé à Paris en 1911, Chagall est aux premières loges pour s’initier aux dernières tendances de l’art moderne. Sur place, tout le séduit : l’impressionnisme, le fauvisme, le cubisme, les réminiscences cézanniennes dont témoigne le Portrait du poète Mazin, mais rien ne fige ses recherches. Elles aboutissent assez vite à un style reconnaissable entre tous, celui déjà en place en 1911 avec le lumineux Moi et le village. La gouache illustre bien la « modernité alternative » de Chagall qui opère la synthèse entre son propre répertoire de formes, ici la tête de vache, motif iconique du vocabulaire chagallien, et les inventions du moment, là les couleurs vives de Robert Delaunay. On pourrait multiplier les exemples d’emprunts sans avoir à réduire la part d’invention de l’artiste, qui reste profondément personnelle tant son imaginaire est puissant. Son inspiration paraît illimitée dans l’illustration des Fables de La Fontaine dont les dessins font l’objet d’un accrochage spécifique. Il en va de même pour les œuvres de Chagall en relation directe avec la musique, le théâtre ou la danse. Retenons celles pour le théâtre juif de Moscou ou pour l’American Ballet Theatre de New York, dont les costumes, présentés dans la dernière salle, closent un parcours aussi pléthorique que réjouissant.