Rétrospective

Tapio Wirkkala, le beau au quotidien

Par Christian Simenc · Le Journal des Arts

Le 16 mars 2016 - 521 mots

À l’occasion du centenaire de sa naissance, la Finlande expose l’œuvre virtuose de l’un de ses plus grands designers, très influencé par la nature.

ROVANIEMI (FINLANDE) - C’est l’un des designers les plus emblématiques de Finlande et, à n’en point douter, l’un des plus féconds. Tapio Wirkkala (1915-1985) a œuvré tous azimuts : des objets au mobilier, du verre au bois, en passant par la céramique ou le métal. À preuve : cette vaste rétrospective intitulée « Still/Life », concoctée à l’occasion du centenaire de sa naissance et présentée au Musée d’art Korundi, à Rovaniemi (Finlande), avant sa reprise, à partir du 24 mars, par le Musée Siida, à Inari, quelque 300 kilomètres plus au Nord. Pourquoi la Laponie ? Parce que c’est la région où Wirkkala aimait à se ressourcer et, surtout, à y chercher l’inspiration. « La Laponie est devenue un endroit où je recharge mes batteries. Lorsque je sens que je suis sur le point de “sombrer”, j’y fais un séjour. C’est pour moi une façon de me recentrer et de rester en vie », avait-il dit en 1975. La nature avec un grand N était son royaume. Pas étonnant de voir apparaître dans sa production des pikkukuovi, courlis ou bécasses de mer, ces étranges oiseaux échassiers à long bec courbe, dont il sculpta dans le bois quelques fameux spécimens ici exposés.

Pipes en bois
Dans une sobre et belle scénographie signée par le designer finlandais Harri Koskinen, deux grandes salles accueillent ce splendide panorama du travail de Tapio Wirkkala. D’un côté, les objets pour la vie quotidienne (« Life »), de l’autre, les œuvres d’art (« Still »). Les uns comme les autres montrent toute la virtuosité de ce créateur hors norme, fumeur devant l’Éternel, comme en témoigne une étonnante collection de pipes en bois profilées telles des virgules. On perçoit d’emblée cette inclination pour la nature. La surface de la tasse Century est aussi granuleuse qu’un test d’oursin et le vase en cristal soufflé Kantarelli [« Chanterelle »] s’ouvre en une délicate corolle. Ses plats en bois stratifié ressemblent à des feuilles d’arbre surdimensionnées et ses couverts s’inspirent de profils d’os d’oiseaux. Mieux : ses sculptures en contreplaqué de bouleau, telle Simpukka [« Moule »], semblent tout droit sortir de la mer.

Dessinée à l’origine, en 1969, pour la compagnie aérienne Finnair et produite par la firme Iittala, la ligne « Ultima Thule » est, par la suite, devenue un classique : ces verres sont comme des blocs de glace en train de fondre, les gouttelettes formant le pied. Même traitement de la surface pour la fameuse bouteille que Wirkkala conçut pour la vodka Finlandia. Le dessin est toujours extrêmement précis. Ainsi en est-il de cette gamme très industrielle d’ampoules aux amusants bulbes pour la société Airam.

L’homme sait sublimer les formes naturelles pour les rendre contemporaines, comme dans le service en mélamine Caravelle ou pour ces vases en céramique à base losangée. Ses « Bouteilles » bariolées à l’allure si actuelle ont, en réalité, été soufflées dans les années 1960 par des verriers de l’île de Murano, en Italie. Tapio Wirkkala était décidément un sacré visionnaire.

Tapio Wirkkala, Still/Life

Du 24 mars au 25 septembre, Musée Siida, Inarintie 46, Inari, Finlande, tél. 358 400 898 212, www.siida.fi, tlj sauf lundi 10h-17h, entrée 10 €.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°453 du 18 mars 2016, avec le titre suivant : Tapio Wirkkala, le beau au quotidien

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