Après avoir magistralement participé en 2015 au sein du Plateau à l’exposition collective « Un mural, des tableaux », consacrée au médium peinture, le Suisse Stéphane Dafflon revient au Frac Île-de-France, mais, cette fois-ci, pour une présentation personnelle de son travail.
Occupant l’intégralité du lieu, environ 450 m2, le plasticien, pour sa première exposition personnelle dans une institution à Paris, dévoile une proposition picturale in situ inédite, questionnant tant l’histoire de la peinture que ses codes ainsi que l’archétype même du sacro-saint dispositif d’exposition : le fameux cube blanc. Depuis une quinzaine d’années, sa peinture abstraite minimale, obéissant à des protocoles précis (utilisation de formes élémentaires et de nuanciers de couleurs), quitte ouvertement la toile et le châssis pour lorgner vers le mur et ainsi proposer aux visiteurs un art de la tangente, brouillant allègrement les pistes entre peinture, design, musique électronique, sculpture et architecture.
Avec Dafflon, il faut se méfier des apparences, certes on peut prendre sa démarche au pied de la lettre, c’est une peinture abstraite tirée au cordeau qui, en affirmant radicalement la grille moderniste, s’inscrit dans la lignée des grands peintres concrets et géométriques tels Max Bill et Richard-Paul Lohse, mais c’est aussi une peinture aventureuse qui, en jouant constamment avec le vide, le blanc et les feintes – ici, un néon faussement défectueux parasite la lecture d’une œuvre, là, une fente dans un mur laisse apparaître un spectre chromatique –, s’émancipe de son cadre pour rappeler au regardeur, véritablement plongé dans un dispositif multicolore immersif, que c’est bien lui qui fait le tableau.
« Stéphane Dafflon, U+25A6 »,
Frac Île-de-France, Le Plateau, 22, rue des Alouettes, Paris-19e, www.fraciledefrance.com
Cet article a été publié dans L'ŒIL n°710 du 1 mars 2018, avec le titre suivant : Stéphane Dafflon, pour une peinture élargie