Placer ses pas dans ceux des voyageurs du XIXe siècle en Iran : c’est ce que propose l’exposition du Louvre-Lens consacrée à la dynastie Qajar, qui régna de 1786 à 1925.
Le parcours, scénographié par Christian Lacroix, évoque par ses enfilades de perspectives, ses cimaises parées de soies de Damas couleur turquoise, safran, fuchsia ou bleu nuit, une promenade dans un palais iranien de cette époque, au sein duquel le visiteur découvre cette culture méconnue. Car si on connaît bien l’Iran des Achéménides et des Safavides, celui des Qajars était resté dans l’ombre.
Une seule grande exposition sur la peinture qajar avait été présentée, en 1998, à New York et à Londres. Au Louvre-Lens, ce sont toutes les manifestations du faste de cour de cette dynastie fondatrice de l’Iran moderne qui se déploient à travers plus de quatre cents œuvres : peintures, dessins, bijoux, émaux, tapis, costumes, instruments de musique, photographies ou encore armes d’apparat. À travers ces pièces étonnantes, dont certaines constituent des prêts exceptionnels de musées iraniens, on découvre ainsi l’Iran à la recherche de son identité, dans une période charnière de son histoire, à la fois enraciné dans la tradition islamique et marqué par les innovations européennes, comme la photographie ou la lithographie.
D’un objet, d’une œuvre à l’autre, on ne cesse de s’émerveiller : ici, un shah à la longue barbe couvert d’or et pierres précieuses, là, une tiare ornée de diamants, de rubis et perles commandée par un sultan d’Oman aux Qajars pour être offerte à la reine Victoria. Plus loin, d’écarquiller les yeux face à une représentation hyperréaliste du palais du Golestan peinte par Kamal al-Mulk, considéré comme un des plus grands peintres iraniens de la modernité, ou encore devant les tutus portés par les femmes à l’intérieur des harems après une visite du shah en Europe, lequel s’était pris de passion pour les ballets. Et l’on tombe en arrêt devant une section du Coran calligraphiée avec un pinceau fait d’un seul poil dans une « écriture poussière » d’une délicatesse ineffable, comme l’on s’amuse des photographies mises en scène pour répondre à la soif d’exotisme des Occidentaux. À voir et revoir.
Cet article a été publié dans L'ŒIL n°713 du 1 juin 2018, avec le titre suivant : Splendeurs des Qajars