Schuiten donne vie à ses planches

Plongée dans la pénombre, dans un décor de bibliothèque pour géants, la série Fragments de Bruxelles évoque une ville familière mais issue d’un monde parallèle. Chaque image est imprimée sur des sortes de calques translucides. Un système d’éclairage fait varier la luminosité et donne l’impression de regarder ces paysages urbains par une fenêtre, de l’aube au crépuscule. L’idée est ingénieuse, car, non seulement elle donne vie aux scènes, mais elle oblige également à observer les images plus d’une fraction de seconde.

Le sable a envahi l’espace central comme dans l’album La Théorie du grain de sable dont les planches sont également traitées de façon vivante grâce à des variations de lumières. « Il s’agissait de renouveler la façon de regarder les planches. Dans un livre, c’est la position idéale. Mais, sur un mur, elles se comparent aux tableaux du musée. Il a donc fallu inventer un dispositif immersif », explique François Schuiten. Le deuxième étage présente la troisième donation de ses œuvres au centre et insiste sur la complicité avec les imprimeurs, artistes à part entière. Le travail sur la tour Saint-Albert, patrimoine industriel belge menacé de destruction, est le plus éclairant. En dix images, du dessin à l’encre de Chine aux huit passages de couleurs, le processus d’impression est mis en valeur pour révéler une œuvre à quatre mains.