Saint Louis, roi des arts

Louis IX, entré dans la postérité sous le nom de Saint Louis, est effectivement l’un des principaux monarques de l’histoire de France. Roi en 1226, décédé en 1270 lors d’une croisade, et canonisé à peine vingt-sept ans plus tard, le personnage possède d’ailleurs tous les ingrédients du mythe. Il est également une des figures constitutives du patrimoine qui nous a légué d’insignes créations artistiques et architecturales, dont la plus célèbre : la Sainte-Chapelle. « C’est un souverain épris de construction, doté de moyens et de goût », rappelle Philippe Bélaval, président du Centre des monuments nationaux. Le CMN, qui a placé le 800e anniversaire de sa naissance au cœur de sa saison culturelle, lui consacre une exposition d’envergure à la Conciergerie, cœur du pouvoir au XIIIe siècle. Son propos est séduisant : « s’éloigner de l’hagiographie, de la célébration et réfléchir à la création de sa légende afin de tenter de retrouver la véritable image du roi », résume son commissaire, Pierre-Yves Le Pogam, conservateur en chef au Louvre. Le parcours à rebours débute ainsi au XIXe, moment où se cristallise le mythe, à travers une belle série de tableaux montrant un roi pieux, valeureux et juste. Il remonte ensuite le cours du temps jusqu’à l’époque de sa canonisation. Une sélection d’objets rares et précieux – sculptures, reliques, manuscrits et objets d’art – permet de saisir l’aura dont jouissait le souverain. Enfin, l’exposition dévoile les pièces contemporaines de Saint Louis, notamment ses grands projets et commandes artistiques. La section dédiée à la Sainte-Chapelle, édifiée pour abriter les reliques de la Passion, mérite à elle seule la visite tant elle concentre de chefs-d’œuvre gothiques. Notamment trois superbes évangéliaires, une délicate Vierge à l’Enfant en ivoire, ainsi que douze panneaux de vitraux démontés au XIXe siècle. Inédits et restaurés pour l’événement, ils pourraient à l’avenir prendre place dans le circuit de visite de la Conciergerie. Enfin, le rayonnement des arts sous son règne est illustré par quelques œuvres majeures, dont l’immense châsse de saint Taurin. Bref, pour ceux qui en douteraient encore : c’est la grande exposition d’art ancien en cours à Paris.

Parallèlement, le château d’Angers s’intéresse à un aspect méconnu de Saint Louis : son influence en Anjou, territoire rattaché au domaine royal en 1214. Afin de protéger cette place stratégique, le roi décide la construction du château d’Angers. L’architecture et l’art angevin évoluent alors considérablement au contact du roi. Malgré la qualité des œuvres, notamment les éléments sculptés polychromes, ce chapitre de la manifestation est relativement modeste : l’essentiel des œuvres du règne de Louis IX étant conservées in situ. La partie consacrée au culte du roi est en revanche plus nourrie. À côté de pièces confidentielles, comme cette étonnante représentation de Louis IX sous les traits d’Henri IV du XVIIe siècle, elle décline les nombreuses variations en plâtre de l’effigie royale et réunit quelques tableaux intéressants conservés dans les lieux de culte angevins, dont ceux d’Émile Laugée et de Félix Auvray. Elle ose même quelques objets insolites, à l’instar d’une improbable grotte en verre filé, écho de l’engouement populaire pour le roi.