Robert Adams

Timide rencontre avec la France

Par Bénédicte Ramade · L'ŒIL

Le 20 décembre 2007 - 347 mots

En France, on ne connaît pas très bien l’œuvre du photographe américain Robert Adams qui jusqu’à présent n’avait pas eu les honneurs d’une monographie. C’est désormais chose faite avec « On the Edge », première rencontre conçue par l’artiste même avec un ensemble de travaux récents. Trois séries sont articulées entre elles, réalisées entre 1990 et 2003 et resserrées sur le territoire de la côte Pacifique nord des États-Unis. Sur les cent cinquante tirages noir et blanc de taille modeste, on préférera les soixante-dix images de Turning Back, regard lucide sur la déforestation intensive que subissent les forêts pluviales de l’Oregon.
Ce qui nous échappe en regardant défiler ces coupes claires aux souches décharnées, c’est l’importance de ce motif dans l’histoire de l’art américain. Déjà le peintre et poète Thomas Cole écrivait en 1835 la complainte de la forêt et, une trentaine d’années plus tard, ­Sanford Gifford peignait un paysage meurtri et ponctué de souches d’arbres.
Adams s’inscrit dans une tradition particulière à l’Amérique, celle des artistes dont l’art déploie une conscience environnementale. De plus, le photographe s’inscrit doublement dans la grande histoire en jouant le jeu de l’exercice « re-photographique » en suivant la route ouverte par les explorateurs Lewis et Clark, première route officielle reliant la côte Est au Pacifique en 1805. Mais toute cette histoire, moins familière au public français, est reléguée au second plan, laissant les photographies se concentrer sur la brutalité de la déforestation. « Ne pas se laisser entraîner à célébrer la puissance des hommes et des machines, qui peut avoir une beauté et un héroïsme diaboliques. Et ne pas esthétiser le carnage. »
Certes les images d’Adam ne cherchent pas la séduction, mais le rapprochement avec des paysages maritimes immuables laisse un peu le visiteur absent. On aurait aimé que la dernière salle, rassemblant quarante publications du photographe, laisse échapper plus d’images et permette de mieux appréhender l’extraordinaire puissance de ce maître du nouveau paysage américain.

« Robert Adams, On the Edge », fondation Cartier, 261, boulevard Raspail, Paris XIVe, tél. 01 42 18 56 50, jusqu’au 27 janvier 2008.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°598 du 1 janvier 2008, avec le titre suivant : Robert Adams

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