Regards croisés sur l’art hollandais

Par Philippe Piguet · L'ŒIL

Le 1 avril 2004 - 438 mots

Familiers des historiens, étudiants et amateurs d’art, les noms de Frits Lugt (1884-1970) et des frères Dutuit – Eugène (1807-1886) et Auguste (1812-1902) – ne le sont pas toujours du grand public. Ce sont pourtant ceux de figures déterminantes de grands pans de l’histoire de l’art tant par l’extrême acuité de leur regard que par le haut degré de leur érudition. Collectionneurs d’art ancien, du XVe au XIXe siècle pour celui-ci et sa femme Jacoba Klever (1888-1969), de l’Antiquité égyptienne à la fin du XIXe pour ceux-là, ils ont notamment contribué, chacun à leur manière, à la défense et à l’illustration de l’art hollandais. Rien d’étonnant pour le Hollandais Lugt qui a créé, en 1947 à Paris où il résidait, la fondation Custodia pour abriter sa collection et qui est à l’origine, en collaboration avec son pays,
de l’Institut néerlandais de Paris dépositaire de celle-ci. Rien d’étonnant non plus de la part des frères Dutuit – qui ont légué leurs collections à la Ville de Paris en 1902 aujourd’hui conservées au musée du Petit Palais – quand on sait qu’Eugène a rédigé en 1883 le catalogue raisonné des estampes de Rembrandt et que celui-ci fait toujours autorité. Intitulée « Regards sur l’art hollandais du XVIIe siècle, Frits Lugt et les frères Dutuit collectionneurs », l’exposition que l’on peut voir rue de Lille et qui a été organisée par les deux institutions parisiennes est l’occasion d’un voyage duel dans le temps. D’une part, elle nous invite à nous replonger dans l’atmosphère d’une époque brillante et riche d’innovations plastiques dont les acteurs ont pour nom Rembrandt, Saenredam, Potter, Ruisdael, Metsu, Steen, Cuyp et bien d’autres. Autant dire nombre des auteurs majeurs d’une production picturale du Grand Siècle ou du Siècle d’or qui ont su insuffler sur la scène européenne un esprit proprement moderne en instruisant une esthétique réaliste nouvelle. L’exposition de l’Institut néerlandais est d’autre part l’occasion de prendre la mesure du goût de collectionneurs qui ont su en leur temps s’entourer de chefs-d’œuvre, sans qu’il se soit agi pour eux de courir après les pièces les plus importantes de chacun des maîtres collectionnés.
Si les tableaux, dessins et gravures qui y sont présentés n’ont pas l’aura d’œuvres de référence, immédiatement repérables, ils ont en revanche cette qualité de petits trésors qu’affectionnent les vrais amateurs parce qu’ils sont l’expression d’une proximité, voire d’une intimité, c’est-à-dire de quelque chose de chaleureux et d’humain, à l’écho du cadre qui les accueille.

« Regards sur l’art hollandais du XVIIe siècle, Frits Lugt et les frères Dutuit », PARIS, Institut néerlandais, 121 rue de Lille, VIe, tél. 01 53 59 12 40, 18 mars-16 mai.

Cet article a été publié dans L'ŒIL n°557 du 1 avril 2004, avec le titre suivant : Regards croisés sur l’art hollandais

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