« La couleur est prise en otage dans le concept. Ayons assez d’audace pour lui rendre sa liberté en tant qu’objet ». Ce texte, signé « Jean-Pierre Raynaud, 1998 » et affiché dans la dernière salle de sa rétrospective à la Galerie nationale du Jeu de Paume, semble marquer un tournant dans le travail de l’artiste. Plus loin, cette affirmation pose la question du statut de la couleur dans son œuvre.
PARIS - Dans Objet aux quatre crochets (1962) – l’œuvre la plus ancienne de l’exposition du Jeu de Paume –, Jean-Pierre Raynaud opposait déjà le blanc au rouge, et ceci bien avant les Psycho-Objets. Dans le catalogue de “Douze ans d’art contemporain en France”, il déclarait en 1972 : “Je voulais le rouge le plus agressif, le plus pur, le plus frappant, alors j’ai tout fait : je suis allé à la caserne des pompiers pour leur demander quelle était leur référence de rouge et je suis arrivé à un vermillon 521 qui me convient”. La même année, l’artiste introduit de nouvelles couleurs dans son œuvre, le vert, le jaune et le bleu, comme en témoignent quelques pièces exposées, Cercueil modèle unique ou Rosier 5 1 1 1. “Que dois-je garder ? s’interrogeait l’artiste en 1972, dans le catalogue de “Rouge Vert Jaune Bleu” au Musée des arts décoratifs. Le noir et le blanc, qui ne sont pas des couleurs. Mais le noir me sert comme dessin. Le blanc reste le fond où tout est possible. Il faut retenir les couleurs comme telles : rouge, jaune, bleu, ainsi que le vert car l’enfant le met lorsqu’il dessine le gazon. Une exposition en quatre couleurs. Primaires, sorties du tube. Mais cernées de noir”. En 1980, il introduit deux nouvelles teintes dans son travail, le vert foncé et le rose saumon, avant de réaliser en 1992 un Hommage à Matisse constitué d’étiquettes vinyle adhésives de produits dangereux.
Champions du monde
En 1987, Jean-Pierre Raynaud commence à travailler à partir du drapeau français. Il intitule même “Bleu, Blanc, Rouge” son exposition à la galerie de France en 1988. Mais dans ces drapeaux, il place encore au centre un panneau blanc carrelé. Dix ans après, l’artiste est allé au bout de sa logique, se débarrassant complètement de l’objet. Il dévoile aujourd’hui, dans la dernière salle du Jeu de Paume, deux drapeaux sur châssis réalisés ces derniers mois, dont un immense format de 3,7 x 5,8 m. Après la folie tricolore qui a envahi la France au mois de juillet, on ne peut s’empêcher d’y déceler un “effet Coupe du monde”.
Jusqu’au 7 février, Galerie nationale du Jeu de Paume, 1 place de la Concorde, 75008 Paris, tél. 01 42 60 69 69, tlj sauf lundi 12h-19h, mardi 12h-21h30, samedi et dimanche 10h-19h. Catalogue, 184 p., 250 F.
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Raynaud haut en couleurs
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°74 du 8 janvier 1999, avec le titre suivant : Raynaud haut en couleurs