Danse & Théâtre

ARTS DE LA SCÈNE

À quoi sert une marionnette ?

Par Margot Boutges · Le Journal des Arts

Le 12 décembre 2018 - 548 mots

LYON

Le nouveau Musée des arts de la marionnette à Lyon propose une scénographie immersive et questionne la place de cette figurine articulée dans la société.

Lyon. Il y a moins de dix ans, les Musées Gadagne de Lyon, qui réunissent au sein d’un hôtel particulier le Musée d’histoire de Lyon et le Musée international des marionnettes, a fait l’objet d’une refonte intégrale qui fut assez critiquée (lire le JdA no 306, 26 juin 2009). Lorsque Xavier de la Selle, qui pilote également le Centre Mémoire et société de Villeurbanne, dans la banlieue de Lyon, est arrivé aux manettes des Musées Gadagne en 2015, il a conçu le projet d’en remodeler le parcours. Entre 2019 et 2022, le Musée d’histoire sera intégralement repensé pour être à la fois un « musée de collections » et un lieu centré sur l’interprétation de son territoire.

Première étape de ce chantier, le Musée des arts de la marionnette a été entièrement remanié en 2017-2018. Depuis novembre, les visiteurs peuvent découvrir la mouture finale de ce petit parcours de dix salles. « L’idée était de se rapprocher d’un musée de société », résume Brigitte Sanvoisin, chargée des collections. L’objectif de ce circuit de visite n’est donc pas tant de présenter les spécificités du fonds du musée – rassemblé sous l’impulsion de Georges-Henri Rivière dans les années 1940-1950 – que de construire un discours général sur le rôle de la marionnette dans la société en s’interrogeant sur trois grandes questions : d’où vient-elle ? à quoi sert-elle ? comment est-elle utilisée ?

Une fonction contestatrice

Cet élargissement du propos nécessitait de faire appel à des prêteurs extérieurs, ainsi le Quai Branly pour des marionnettes rituelles venant du Vanuatu ou de Sumatra, voire d’exposer des répliques d’œuvres (telle la statuette de Brno qui est la plus ancienne figure articulée jamais découverte). Il s’agit pour ce nouveau musée de montrer que la marionnette continue d’avoir une fonction, souvent contestatrice, dans les sociétés contemporaines. Aussi, des compagnies ou des collectifs ont été sollicités pour prêter certains de leurs instruments de jeu, parfois entre deux représentations. Des personnages émanant de la farce politico-satirique française Les Maîtres du monde [production La Controverse, création inspirée de l’œuvre de Jean Ziegler] côtoient ainsi une marionnette à l’effigie de Bachar el-Assad, réalisée pour la web-série syrienne « Top goon » qui tourne en dérision le régime en place.

Les figures qui ont fait l’identité du musée lyonnais n’ont pas disparu pour autant derrière ces nouveaux arrivants. Si Guignol – créé dans la capitale des Gaules vers 1808 – ne bénéficie plus d’une salle pour lui tout seul, il fait office de fil conducteur dans ce parcours dont les œuvres doivent être (conservation préventive oblige) renouvelées régulièrement. Gageons que ce lieu, qui a pour vertu d’offrir un propos synthétique, rencontrera un vif succès auprès des familles, auxquelles il s’adresse particulièrement. Il multiplie à cet effet les dispositifs de médiation : bornes tactiles, projections montrant des marionnettistes en plein travail, castelet pour s’essayer au maniement des marionnettes…

Il est doté également d’une scénographie immersive, qui puise largement dans le monde du spectacle. La plupart des pièces ne sont pas présentées sous vitrine, comme c’était auparavant l’usage, mais sous « filtrine », soit une suite de fils verticaux rappelant ceux des marionnettes qui opèrent une mise à distance entre l’objet et le public.

Musée des arts de la marionnette
(MAM), 1, place du Petit-Collège, 69005 Lyon, gadagne.musees.lyon.fr

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Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°513 du 14 décembre 2018, avec le titre suivant : À quoi sert une marionnette ?

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