Le château de Versailles réhabilite la peinture de François Lejeune, témoin des batailles napoléoniennes.
VERSAILLES - Méconnu plus qu’inconnu, François Lejeune (1775-1848) retrouve les honneurs des salles du château de Versailles. Ce touche-à-tout, à la fois militaire, peintre et écrivain, actif sur la plupart des champs de bataille de l’épopée napoléonienne, fait l’objet d’une première grande exposition monographique. Ce n’est là que justice : depuis le second Empire, le château conserve en effet douze des grandes batailles qui ont fait le succès du peintre en son temps. Toutefois, pour qui ne serait guère amateur de ce genre si singulier, l’exposition a été très intelligemment conçue. Au-delà du caractère exceptionnel de la personnalité du peintre, le fil conducteur de la présentation s’attache en effet à inscrire Lejeune dans la lignée de l’histoire de la peinture de bataille. Même s’il n’en sort pas toujours grandi. Formé à la peinture par le paysagiste Pierre-Henri de Valenciennes (1750-1819), Lejeune restera tributaire de cet héritage. C’est avec Le Premier passage du Rhin en 1795 qu’il donne la pleine mesure de son talent : composition panoramique, reléguant la bataille à l’arrière-plan, reconstruction historique et multitude d’anecdotes figurés au premier plan. Soit une formule qui aurait pu faire se bousculer les curieux du Salon de 1824. Las ! En pleine Restauration, le tableau est refusé pour traiter d’un épisode révolutionnaire. « Comme Boilly pour la scène de genre, c’est parfois la peinture par le petit bout de la lorgnette confesse Valérie Bajou, commissaire de cette exposition. L’œil de Lejeune est souvent plus proche de la carte militaire en peinture que de la peinture de bataille. » De fait, Lejeune s’inscrit davantage dans la lignée des peintres partie prenante des champs de bataille, tels que Van der Meulen puis Bagetti ou Bacler d’Albe, adeptes des panoramas et des détails d’uniformes, plus que dans celle des peintres d’histoire, tels Gros, Girodet ou Gérard. La juxtaposition de grandes toiles de Lejeune et d’esquisses de ces derniers produit une démonstration sans faille. En témoigne notamment L’esquisse de La bataille d’Austerlitz de Gérard (1806-1808, San Francisco, musée de la Légion d’honneur), qui semble être la reprise d’un groupe figuré sur l’un des grands dessins de Lejeune exposés au Salon de 1806. Le peintre d’histoire a su faire d’un simple détail un véritable sujet. Lejeune finira pourtant sa carrière en peintre établi. Ses tableaux monumentaux relatant la campagne espagnole indiquaient déjà sa volonté de se confronter à la figuration du nu – en se mettant lui-même en scène – même si quelques dessins, corroborés par une grande commande pour la ville de Douai (Épisode de la campagne de Prusse, 1842), confirment ses maladresses dans le traitement anatomique. Il n’empêche. En 1837, Lejeune est nommé directeur de l’École de dessin de Toulouse. Il peut alors se consacrer à son art. Et se mettre à peindre à nouveau… des paysages.
Commissariat : Valérie Bajou, conservateur au château de Versailles
Scénographie : Nicolas Adam, architecte d’intérieur
Nombre d’œuvres : 120
Jusqu’au 13 mai, salles d’Afrique et de Crimée, tlj sf lundi 9h-17h30, château de Versailles, www.chateauversailles.fr,
cat. Hazan, 280 p., 39 €, ISBN 978-2-754-10602-3
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Peintre et militaire
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°364 du 2 mars 2012, avec le titre suivant : Peintre et militaire