Le Miam cède son espace et sa vocation singulière de musée des arts modestes à une exposition baroque placée sous le signe de la narcoculture en général et de son impact sur la culture visuelle mexicaine en particulier. Face à une trame thématique qui aurait pu chavirer vers le cynisme, le racolage ou le moralisme le plus ordinaire, le musée prend soin d’afficher ses précautions et entérine sa prudence par un sérieux catalogue. Rien de bien sulfureux donc dans les choix opérés par Marco Granados, même si le parcours cède volontiers au kitsch et à l’exotisme de l’univers du narcotrafic et de sa représentation, d’autant plus que le parcours fait la part belle à la culture populaire mexicaine, largement abreuvée des références visuelles fournies par cette économie souterraine.
Jeux d’insignes visuels et de comportements où dollars, vêtements, accessoires et bijoux claquent comme autant de signes extérieurs de reconnaissance, traditions et légendes nourries par l’histoire de cette délinquance organisée, tous ces codes exécutent de troublants allers-retours en particulier entre cinéma et milieu criminel. Les références ne manquent pas, et les artistes s’en saisissent comme autant d’éléments intégrés dans l’imagerie collective, engageant leur production artistique sur le terrain du quotidien, des petites et grandes misères générées par la pleine occupation économique, sociale et politique des narcotrafiquants, ou surfant parfois sur la couleur héroïque et quasi révolutionnaire de certains d’entre eux. L’exposition embrasse tout à la fois, jusqu’aux moindres recoins de la création, convoquant reliques, musiques, graffitis, arts plastiques, architecture, religion ou cinéma, quitte à amalgamer les registres. En point d’orgue au parcours, se dresse une reconstitution paradigmatique de la chapelle mexicaine de Culiacan, offerte à Jésus Malverde, saint patron des narcotrafiquants. Peintures votives, reliques, objets, prières, feuilles de cannabis, remerciements, fleurs et bougies en saturent l’espace et attestent de l’emprise de cette culture de vie et de mort. À l’assimilation populaire, s’ajoute alors celle, plus critique, plus douloureuse de quelques jeunes artistes mexicains parmi lesquels Francisco Larios Osuna, Teresa Margolles Sierra ou Carlos Ranc, examinant, critiquant, constatant et tournant autour de cette culture marginale fixée avec autant de violence que de banalité dans la société mexicaine moderne, que l’exposition « Narcochic, Narcochoc » se charge de raccorder au reste du monde par la mise en œuvre et en images de
la consommation de stupéfiants… licites ou non.
« Narcochic Narcochoc », SÈTE (34), Musée international des arts modestes (Miam), 23 quai Maréchal de Lattre de Tassigny, tél. 04 67 18 64 00, 8 avril-28 juin.
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Narcostyle
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°558 du 1 mai 2004, avec le titre suivant : Narcostyle