Art contemporain

Molnar/Knifer, connivences géométriques

Par Philippe Piguet · L'ŒIL

Le 1 mai 2004 - 380 mots

Originaires d’Europe centrale, elle de Hongrie, lui de Croatie, tous deux nés en 1924, Véra Molnar et Julije Knifer partagent encore en commun d’appartenir à cette tendance de l’art abstrait que l’on qualifie commodément de géométrique. Si leur art en appelle tant au construit qu’au concret, au rationnel qu’au sériel, il ne s’interdit toutefois ni le sensible, ni le ludique, comme en témoigne l’exposition duelle que la fondation Salomon a jugé pertinent de leur consacrer. 

Conçue sous l’autorité critique de Vincent Baby, intitulée « Lignes et méandres », celle-ci les rassemble plus sur le mode de la convergence, sinon de la connivence, que sur celui de la comparaison. Il y est question de figures et de formes qui multiplient les jeux de la géométrie et de la géographie dans cette façon de vouloir tout à la fois mesurer et l’espace et le temps pour les inscrire dans un univers chaque fois spécifique. Le genre de l’autoportrait qui introduit chacune des présentations du travail de ces deux artistes situe d’emblée leur propos au regard de la radicalité du choix esthétique qu’ils ont fait par la suite. L’exclusion de toute référence au réel et le choix quasi unique du noir et blanc au bénéfice de la déclinaison délibérément systématique de modules géométriques relève de la volonté de privilégier l’essence sur l’apparence, l’être sur le paraître. La rigueur scientifique de Véra Molnar, qui fut la première dans les années 1960 à se servir de l’ordinateur comme assistant de création, le dispute à celle de Knifer davantage fondée sur une pratique du dessin envisagée comme un exercice autobiographique. L’intérêt de l’exposition savoyarde réside notamment dans l’occasion qu’elle nous offre de mesurer l’attitude pionnière des démarches de Molnar et de Knifer par rapport à toutes sortes de productions minimales égarées dans un formalisme sans issue. Si les dessins et les peintures de l’un et de l’autre s’articulent autour des mêmes concepts de rythme, de répétition, de séquence, de motif ou encore de composition, leur façon propre d’appréhender l’espace, dans le déploiement de la ligne chez Molnar, dans le creusement des méandres chez Knifer, les distingue et qualifie singulièrement chacune de leurs œuvres.

« Véra Molnar – Julije Knifer. Lignes et Méandres », ALEX (74), château d’Arenthon, tél. 04 50 02 88 55, 20 mars-23 mai.

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Cet article a été publié dans L'ŒIL n°558 du 1 mai 2004, avec le titre suivant : Molnar/Knifer, connivences géométriques

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