Marcheschi, tout feu tout flamme

Gouffres, Oracles, Morsures de l’aube, Dante chantXXXIV de L’Enfer, La Forêt des suicidés, Le Dernier Voyage d’Ulysse, Constellation du serpent, Hurlements, Météores… ; chaque œuvre surgit tel un pétrifiant affleurement des inquiétudes humaines. Jean-Paul Marcheschi (né à Bastia en 1951) est un peintre sans pinceaux. Depuis 1984, ses pinceaux sont des bougies et des flambeaux allumés, ses matériaux sont le noir de fumée, la cire, parfois le goudron, beaucoup plus rarement la peinture. Il est aussi un homme de mots pour qui tout commence par l’écriture. Comme un rituel immuable, chaque matin l’artiste se saisit d’une feuille de papier, toujours de format A4, et laisse librement courir son stylo. Il écrit ce qui vient, « brut de décoffrage », sans retenue ni correction. Ce sont ces feuilles constellées de lettres qu’il étale ensuite sur le sol de son atelier parisien et sur lesquelles il projette la cire fondue de ses cierges allumés. Puis le feu poursuit son ouvrage en recouvrant de suie intensément noire des surfaces minuscules, ou immenses. Assemblées sur un même plan, ces petites feuilles deviennent de petites ou très grandes surfaces vibrantes de tensions toujours denses, souvent inquiètes. À deux pas du Musée des arts précieux, la voûte de la station de métro des Carmes accueille depuis 2007 une imposante réalisation de Marcheschi, La Voie lactée, photogrammes de six mille feuillets de format A4 recouverts d’écriture, de cires incandescentes et d’empreintes de flammes.