Objets d’art

À l’heure des pendules

La Galerie des Gobelins, à Paris, présente la créativité des meilleurs horlogers et bronziers du XIXe siècle

Par Sophie Flouquet · Le Journal des Arts

Le 3 novembre 2010 - 476 mots

PARIS - À partir d’un sujet au combien difficile, celui des pendules et bronzes d’ameublement français du XIXe siècle, le Mobilier national parvient à proposer une surprenante exposition

Par sa scénographie, tout d’abord, l’architecte Didier Blin ayant réussi à métamorphoser l’espace monotone de la Galerie des Gobelins. Un fil du temps, constitué par les vitrines protégeant les pendules, cartels ou autres régulateurs, a été étiré sur les deux étages de la galerie. Il est complété par des séries typologiques de bras de lumière ou autres candélabres, mais aussi quelques lustres, meubles et tapisseries qui ont décoré les palais de l’État. Grâce à ce dispositif sobre, l’attention du visiteur est captée par l’exubérance décorative de ces luxueuses pièces. Provenant des collections du Mobilier national, soit l’ancien Garde-Meuble royal puis impérial, ces objets précieux ont été créés au lendemain de la Révolution et jusqu’à la fin du Second Empire. Ils ont été acquis par l’institution afin de mettre en valeur les lieux de pouvoir qu’il fallait alors remeubler après les pillages et ventes révolutionnaires. Les meilleurs artisans ont été sollicités, parmi lesquels les horlogers Lepaute, Bailly ou Dubuc, et les bronziers Thomire, Galle, Barbedienne ou Charpentier. Et l’exigence de contrôle et d’entretien des pièces, du fait du statut de l’institution, leur offre aujourd’hui une traçabilité unique. De quoi écrire avec précision une histoire du goût, à une époque où la pendule devient un véritable phénomène de mode. Au XIXe siècle, tout intérieur doit être décoré de pendules de cheminée adaptées à la destination de chaque pièce. D’où une grande variété des modèles, le Mobilier national en conservant à lui seul 900 exemplaires. Quelques-unes sont des pièces exceptionnelles. Ainsi de La Chute de Phaéton, conçue à la fin du XVIIIe siècle, autant sculpture qu’objet d’art mais aussi monument de propagande à une époque où certains appellent à un pouvoir fort après le chaos révolutionnaire. Ces pièces, sur lesquelles il n’était pas rare d’ôter abeilles et aigles ou fleurs de lys, portent souvent les stigmates des aléas politiques du XIXe siècle. La fonction de la pendule disparaît alors au profit du motif. La porosité entre les arts donne lieu à des créations telles que cette pendule du Serment des Horaces, fabriquée vers 1805 pour le prince Murat au palais de l’Élysée, d’après le célèbre tableau de David. Manifestement, la question des droits d’auteur n’était alors pas la préoccupation des bronziers, plus soucieux de créer des pièces susceptibles d’épater une clientèle avide de nouveauté. 

L’HEURE, LE FEU, LA LUMIÈRE, BRONZES DU GARDEMEUBLE IMPÉRIAL ET ROYAL,1800-1870,

Jusqu’au 27 février 2011, Galerie des Gobelins, 42, avenue des Gobelins, 75013 Paris, tél. 01 44 08 53 49, www.mobiliernational.fr tlj sauf lundi 11h-18h. Catalogue, éd. Faton, 349 p., 75 euros, ISBN 978-2-8784-4130-7

Commissariat : Marie-France Dupuy-Baylet, inspectrice conseillère de la création artistique et de l’action culturelle au Mobilier national
Scénographie : Didier Blin, architecte muséographe

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°334 du 5 novembre 2010, avec le titre suivant : À l’heure des pendules

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