Autour de deux œuvres magistrales des Brueghel père et fils, le Musée de Cassel expose les ports, les batailles et les tempêtes mouvementées des Flamands de l’âge d’or.
CASSEL - Une exposition sur la peinture marine dans les Flandres du XVIe et XVIIe ? À première vue, le sujet semble bien sage : il n’en est rien sur les côtes de Dunkerque à Haarlem, dans ces siècles qui forgent cartographies et richesses du nouveau monde encore tout frais. La mer fascine l’Europe en général, source de terreur, domaine de l’irascibilité de la Nature, des pirates et des monstres mythiques, mais source de richesse, nourricière en cabotage, numéraire pour les compagnies au long cours.
Dans les Flandres, des Pays-Bas espagnols aux Provinces unies, le littoral voit prospérer Bruges, Anvers, La Haye, Amsterdam : c’est sur ce salutaire rappel historique que s’ouvre l’exposition « La Flandre et la mer » au Musée de Flandre à Cassel. Dans le parcours, il faut passer devant un très beau Franz Snijders, Le marché aux poissons (Anvers, Museum Rockoxhuis), voir les tempêtes meurtrières, les vagues comme des rochers, les batailles contre les Ottomans, et surtout s’intéresser aux gravures de Pieter Brueghel l’Ancien, la série des « Vaisseaux de guerre », qui témoignent d’une facette peu connue de Brueghel, sa fascination pour les navires, en mer du Nord et en Méditerranée. Ses vaisseaux relèvent infiniment plus du portrait que du simple paysage. D’une ligne, d’un trait, l’artiste fait tanguer, chavirer, vibrer la ligne de flottaison de ces carlingues si familières aux hommes fréquentant des ports en pleine expansion.
Virtuose des vagues
Mais c’est une bataille qui accroche le regard : attribuée à Pieter Brueghel l’Ancien, Bataille navale dans le golfe de Naples, venue de la Galerie Doria Pamphilj à Rome et restaurée pour l’occasion, est une œuvre étonnante. Un point de vue maritime peu courant pour l’époque, une manière de sculpter les vagues non pas dans la matière mais par le pinceau, une palette chromatique extrêmement lumineuse : ce tableau est un tel tour de force qu’il paraît naturel de l’attribuer au maître anversois passé en Italie dans les années 1552-1554.
À l’étage, l’autre point d’orgue de l’exposition nous amène devant Jan Brueghel l’Ancien, dit Brueghel de Velours, le fils du précédent. Sa Scène portuaire avec le départ de saint Paul (1596, Raleigh, North Carolina Museum) a tout d’un prétexte pour faire exploser l’infinie délicatesse des détails, la virtuosité et la préciosité du peintre dans des toiles de petite taille, où l’éclat d’une huître se savoure avec délice.
Commissariat : Sandrine Vézilier-Dussart, conservatrice du Musée départemental de Flandre et Cécile Laffont, attachée de conservation
Nombre d’œuvres : environ 80
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Les tempêtes flamandes des Brueghel
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Abonnez-vous dès 1 €Jusqu’au 12 juillet, Musée de Flandre, 26 Grand’Place, 59670 Cassel, tél. 03 59 73 45 60, www.museedeflandre.lenord.fr, mardi-vendredi 10h-12h30 et 14h-18h, samedi et dimanche 10h-18h, fermé le lundi, entrée 3 €. Catalogue Éditions Snoeck, 160 p., 28 €.
Légende photo
Attribué à Pieter Bruegel l'Ancien, Bataille navale dans le golfe de Naples, huile sur bois, Palazzo Doria Pamphilj, Rome. © Trust Doria Pamphilj.
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°436 du 22 mai 2015, avec le titre suivant : Les tempêtes flamandes des Brueghel