Les rêves, et au-delà

Au sein de l’exposition « Au-delà de mes rêves », organisée conjointement par le Monastère royal de Brou et le centre d’art H2M, il s’agit assurément d’un appel à l’action. « Rêvez ! », demande-t-on au visiteur, comme l’a demandé en 1979 Sophie Calle à vingt-huit Dormeurs, dont Fabrice Luchini. « J’ai demandé à des gens de m’accorder quelques heures de leur sommeil. De venir dormir dans mon lit. De s’y laisser photographier, regarder », explique l’artiste. En 2007, le Britannique Mat Collishaw n’a pas fait autre chose lorsqu’il a demandé à des mères célibataires de venir poser avec leur enfant. Éclairées à la bougie, ces « vierges » nocturnes posent à la façon d’un de La Tour, sans doute pour se souvenir qu’elles aussi mourront. D’ailleurs, L’Ange de feu de Shigeko Hirakawa, qui déploie ses ailes dans la nef de l’église de Brou, est venu le leur rappeler. Car, du rêve au sommeil, et du sommeil à la mort, il n’y a qu’un pas que franchissent le séraphin et la tête de hibou – l’un des Messagers de la mort décapitée – de Jan Fabre.

Parfois, ils sont déjà décédés, comme le père de Clémentine de Chabaneix, auquel la barque échouée sur un lit de feuilles rend hommage. Parfois, ils ne le sont pas encore, mais la mort rôde au-dessus de leurs nuits, celles de Salman Rushdie, filmé durant son sommeil par Mounir Fatmi (Sleep Al Naïm, 2005-2012). « Au-delà de mes rêves », développement long d’une exposition ébauchée par Marie Deparis-Yafil à la Galerie Mondapart, tient éveillé un visiteur émerveillé, que seule une scénographie malheureuse qui veut que tout soit aligné le long des murs ramène à la réalité.