PARIS
Influence - L’attitude des visiteurs est souvent un bon baromètre de la pertinence d’une exposition.
À scruter la mine perplexe, voire déconfite, de certains amateurs croisés à la sortie du Musée du Luxembourg, on comprend que le sujet n’a pas soulevé un enthousiasme démesuré. Le pitch était pourtant séduisant : raconter le coup de foudre amical et esthétique entre Pablo Picasso et sa première mécène, Gertrude Stein.
Un récit fondateur des avant-gardes qu’il était tentant de mettre en images. Hélas, ce n’est pas exactement ce que raconte in fine l’exposition, dont on peine à saisir le véritable sujet et plus encore la cohérence. Cette complicité semble en effet un simple prétexte pour attirer un vaste public grâce à une tête d’affiche « bankable ». Le propos de fond est en effet nettement moins vendeur que Picasso, puisqu’il s’agit de l’influence de la poésie radicale de Stein sur les artistes américains de la seconde moitié du XXe siècle.
Si vous voulez admirer des œuvres conceptuelles ou endurer une vidéo de Bruce Nauman qui hurle en boucle, vous êtes au bon endroit. Si vous souhaitez vous replonger dans les heures glorieuses de l’invention du cubisme, vous resterez en revanche sur votre faim, les œuvres de l’Andalou représentant péniblement un cinquième des pièces exposées. Et ne comptez pas non plus découvrir des tableaux ou des assemblages inédits, ou rarement vus, car ils proviennent tous du Musée Picasso. Pis encore, même la relation entre le peintre et sa collectionneuse, histoire ô combien rocambolesque, est à peine survolée.
Cet article a été publié dans L'ŒIL n°769 du 1 novembre 2023, avec le titre suivant : Les retrouvailles ratées de Gertrude et Picasso