Écrin de miroirs réfléchissants, le château de Rentilly reçoit une exposition regroupant vingt-cinq artistes internationaux concernés par la matière, dont la regrettée Christine Deknuydt (1967-2000) à qui cet événement rend hommage.
L’école régionale des beaux-arts de Dunkerque (ERBA), où celle-ci a fait ses études, a récemment fait une donation au Frac Grand Large d’œuvres de l’artiste, ses dessins, utilisant souvent des matériaux toxiques, qui sont exposés en compagnie d’œuvres de la collection de ce Frac, invité par le Frac Île-de-France. Sur deux niveaux, la manifestation réunit des plasticiens de générations diverses, des pointures tels Andre, Beuys et Villeglé côtoient des contemporains aguerris ou en devenir (Julien Creuzet, Jean-Luc Verna…), afin de proposer de multiples relations à la matière nourries d’approches scientifiques, historiques, littéraires ou spirituelles. Si la puissance plastique d’œuvres constituées de matériaux bruts par des ténors issus de mouvements historiques du XXe siècle (Arte Povera, Land Art, minimalisme, Nouveau Réalisme et Fluxus), n’est plus à démontrer, on prend plaisir à les retrouver ici, car la scénographie « aérée » leur permet d’affirmer toutes leurs charges énergétiques ou symboliques. Puis leur cohabitation avec des pièces plus actuelles de jeunes artistes, telles Nina Canell et Christine Deknuydt visiblement marquées par l’anthologique « L’Informe : mode d’emploi » (1996) de Beaubourg, intensifie habilement l’opposition entre la rigueur formelle du « purement optique » et le bas matérialisme, l’entropie. Ainsi, avec cet entremêlement de points de vue différents sur la matérialité de l’art, cette expo collective devient un laboratoire de chimie dévoilant la matière dans tous ses états.
Cet article a été publié dans L'ŒIL n°713 du 1 juin 2018, avec le titre suivant : Les multiples facettes de la matière
