Années 1950

Les dernières années de Nicolas de Staël

Par Maureen Marozeau · Le Journal des Arts

Le 21 septembre 2010 - 544 mots

Nicolas de Staël revient à la Fondation Pierre-Gianadda, en Suisse. Gros plan sur les dix dernières années de sa carrière.

MARTIGNY - Nicolas de Staël est l’un des rares artistes à avoir eu l’honneur d’une seconde invitation à la Fondation Pierre-Gianadda, à Martigny, en Suisse. Un second rendez-vous placé sous le signe de la fidélité : membre du conseil d’administration de la fondation, Jean-Louis Prat revêt les habits de commissaire qu’il avait déjà portés il y a quinze ans, lors de la première rétrospective consacrée au peintre à Martigny. Le directeur des lieux, Léonard Gianadda, souligne pour sa part que le peintre d’origine russe figure dans la collection de la fondation depuis 1988 – date de l’achat des Footballeurs (1952), l’une des toiles inspirées par les soirées exaltantes passées au Parc des Princes. Par dessein, l’exposition se concentre sur la dernière décennie du peintre, de 1945 à 1955, période durant laquelle son style évolue considérablement. Des années de formation de Nicolas de Staël, l’on ne voit qu’une photographie prise à l’arraché dans l’atelier de Fernand Léger en 1938. L’une des premières toiles du parcours vient heureusement rappeler l’attachement du peintre aux classiques : Hommage à Piranèse (1948) figure parmi les premiers jalons de ce cheminement décrit par Jean-Louis Prat. Selon le commissaire, de Staël ne choisit pas entre l’abstraction et la figuration ; il cherche une autre voie et « seule la référence à une peinture ancienne l’intéresse ». De cette première période, on retient une touche épaisse, une tonalité sombre : aux blessures encore ouvertes de la guerre s’ajoute le décès de sa première épouse, Jeanne, en 1946. Dès lors l’accrochage déroule le fil chronologique et chromatique de la vie du peintre. Avec les années, égayées par un second mariage et plusieurs séjours méditerranéens, la couleur et la touche s’allègent ; le sujet, notamment la nature morte, revient au premier plan.

Avec justesse, Jean-Louis Prat établit un parallèle entre de Staël et Van Gogh, tous deux passés de l’ombre à la lumière en découvrant le soleil du sud de la France. À la différence que Nicolas choisit de peindre des paysages vides de toute présence humaine et qu’il n’a jamais exprimé le même intérêt que Vincent pour les travailleurs de la terre.  En 1954, Nicolas s’installe à Antibes où, en six mois, il peint trois cent cinquante tableaux en vue d’une exposition au Musée Grimaldi. La technique du fusain semble s’être immiscée dans sa peinture, tant la touche en devient transparente. Superbe silhouette sur fond rouge, le grand Nu couché bleu (1955) achève d’illuminer l’espace ingrat du bunker de Martigny avant le black-out final.

Outre le concours important de la famille de Staël, Léonard Gianadda et Jean-Louis Prat ont clairement usé de leur entregent auprès de collectionneurs particuliers pour obtenir la quasi-totalité des œuvres présentées ici, parmi lesquels quelques joyaux. Faisant de cette exposition une version « off » de la grande rétrospective du Centre Pompidou qui s’était tenue à Paris il y a déjà plus de sept ans.

NICOLAS DE STAËL

Commissaire : Jean-Louis Prat
Nombre d’œuvres : 128 tableaux et œuvres sur papier

NICOLAS DE STAËL, jusqu’au 21 novembre, Fondation Pierre-Gianadda, 59, route du Forum, Martigny, Suisse, tél. 41 27 722 39 78, www.gianadda.ch, tlj 9h-19h. Catalogue, 288 p., 34,50 euros, ISBN 9-782-884431-28-6.

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°331 du 24 septembre 2010, avec le titre suivant : Les dernières années de Nicolas de Staël

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