À la villa Arson, la première rétrospective majeure de Paul McCarthy (lire le JdA n°130, 29 juin) en France permet d’appréhender l’œuvre de ce dernier sans se cantonner à son iconographie provocante. En proposant de nombreuses installations, l’exposition insiste sur le caractère sculptural du travail de l’artiste américain.
NICE - Ça sent le ketchup à la villa Arson. À l’entrée des salles d’exposition, la cabane de Bossy Burger (1991) en est d’ailleurs largement maculée. Véritable décor avec ses rampes d’éclairages et ses faux murs, l’installation documente en quelque sorte la performance/fiction qui s’y est déroulée. Elle la rejoue aussi par écrans interposés : l’artiste – masqué et déguisé en cuisinier – se livre, déchaîné, à une version “trash” de la Cuisine des mousquetaires. De la viande aux sauces variées, tout un attirail culinaire renvoie aux corps et à ses sécrétions. À huis clos, et sans caméra, Paul McCarthy a d’ailleurs remis la main à la pâte une dernière fois avant l’ouverture de l’exposition. Comme pour réinvestir ou réactiver son œuvre, il s’est livré à une nouvelle action dans ce plateau de tournage ensuite laissé aux visiteurs. À côté, Assortment, The Trunks ; Human Object (1972-1984) contient dans ses caisses des objets utilisés lors d’actions. Comment figurer la performance ? Que faire de ces reliques ? Comment tourner la chose en œuvres ? Telles sont les questions émises par ces pièces. Sens dessus dessous, le Santa Chocolate Shop (1997) repose les mêmes interrogations. Exposé sur la tranche, à l’exception de la machine à chocolat qu’il renferme, la cabane et son mobilier collé au mur s’imposent comme une sculpture. Une forme d’autant plus présente, qu’elle délivre sur les murs environnants des projections relatant la performance qui l’accompagne. Par la complexité de sa structure en coude et ses constructions fantasmatiques autour du célèbre personnage au grand appendice en coude, Pinocchio Pipenose Householddilemma (1994) poursuit la même voie.
Plus qu’à l’iconographie “pipi-caca/mayonnaise-ketchup”– marque de fabrique qui vire parfois à la formule maniériste –, c’est à la dimension sculpturale de l’œuvre de McCarthy que la villa Arson rend justice en accueillant la rétrospective conçue initialement par le New Museum of Contemporary Art de New York. Bien que de façon moins prononcée que son acolyte, Mike Kelley, il place indéniablement son travail dans la part refoulée du triomphe de l’art moderne. Il s’attaque à ses mythes (The Painter, 1995, qui peint avec un tube d’excrément et fait renifler ses fesses par un collectionneur) et à ses formes : daté de 1975, A Skull with a Tail, se moque du cube minimal en l’affublant d’une petite queue tout aussi géométrique. Quant à Spaghetti Man (1993), exposé dans un long couloir avec son sexe déroulé, il n’est pas sans rappeler avec humour les alignements de Richard Long...
- PAUL MCCARTHY, jusqu’au 29 septembre, villa Arson, 20 avenue Stephen-Liegard 06100 Nice, tél. 04 92 07 73 73, tlj sauf mardi, 13h-18h, www.cnap-villa-arson.fr
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L’empereur Tomato ketchup
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°132 du 14 septembre 2001, avec le titre suivant : L’empereur Tomato ketchup