L’échappée belle du dessin

Sur deux étages, une soixantaine d’artistes internationaux, ayant le goût du tracé aventureux (les supports y sont multiples, du papier à la feuille d’arbre en passant par la planche de skateboard !), côtoient tant un ensemble inédit d’œuvres d’art carcéral japonais que des dessins préparatoires de graffitis abordés sous un angle novateur. Ce qui détonne, c’est l’accrochage, mettant sur le même plan, avec une parité bien respectée, des anonymes, de grandes signatures de l’Art brut, tels Janko Domsic, Victor Simon, Marcel Storr et Pépé Vignes, des petits nouveaux jamais exposés, des bédéistes, des condamnés à mort ainsi que des vedettes du dessin contemporain : David B., Marcos Carrasquer, Laurie Lipton, Daisuke Ichiba, Davor Vrankić. On a ainsi l’impression d’une démocratisation du dessin et d’un regard sans œillères posé dessus, ne se laissant pas phagocyter par une histoire de l’art linéaire afin de s’ouvrir au maximum à l’altérité artistique. Ce déploiement égalitaire est très bien. Cette proposition collégiale, sur fond de chemins de traverse et d’école buissonnière du dessin (moult autodidactes dans les forces en présence réunies), nous invite vraiment à quitter joyeusement les autoroutes par trop balisées de l’art contemporain, ayant pignon sur rue, et de ses officines, pour s’autoriser à divaguer du côté de l’énergie créatrice de la contre-culture – notre coup de cœur revenant à un certain John Robert Ellis, se faisant appeler également « Black Jesus Christ Junior » (rien que ça !), un gros caïd réalisant en prison aux États-Unis des dessins « bling-bling » savoureux mythifiant sa propre personne. Bref, on sort de là emballé, des dess(e)ins plein la tête !