Peintre peu respectueux des conventions académiques, Paolo Pagani (1655-1716) devrait séduire le public d’aujourd’hui, invité à le redécouvrir dans deux expositions organisées conjointement par deux villes du Tessin.
RANCATE ET CAMPIONE D’ITALIA. La Galerie municipale de Campione d’Italia et la Pinacothèque cantonale Giovanni Züst de Rancate s’associent pour présenter la première rétrospective de l’œuvre de Paolo Pagani. Né en 1655 à Castello di Valsolda, dans la région de Côme, ce peintre est mort en 1716 à Milan, après avoir connu un immense succès dans toute l’Europe. À Rancate sont présentés quelques dessins, ainsi que des œuvres de jeunesse et de la première maturité, passées entre Venise, la Lombardie et la Moravie. À Campione sont exposées les œuvres lombardes de la dernière période : trente tableaux en tout, dont quelques-uns de très grand format, et dix dessins provenant de son stupéfiant corpus graphique, retrouvé il y a peu dans la Bibliothèque d’État d’Olomouc. Il faut en profiter pour visiter deux églises des environs : la paroissiale de San Martino, à Castello di Valsolda, et celle d’Uggiate Trevano, où d’importantes restaurations ont restitué aux tableaux leur qualité picturale d’origine. Outre l’Italie, la France, la Belgique, l’Allemagne et la République tchèque ont prêté des œuvres de peintre singulier, présent dans les musées de l’Europe entière mais qui n’était jusqu’à présent connu que des spécialistes. Il s’agit donc d’une redécouverte, tout au moins pour le grand public. La veine excentrique qui explose lors de son voyage en Europe ne se démentira pas au cours de ses années milanaises, de 1700-1701 à sa mort. Sa carrière avait débuté à Venise, où il est arrivé adolescent, sous le signe du ténébrisme alors en vogue dans la Sérénissime (La douleur d’Abel du Musée de Braunschweig en est un bel exemple). Mais c’est son séjour en Moravie, en Pologne et à Vienne qui lui apporte le succès et, avec lui, la possibilité de s’exprimer sur de vastes surfaces. Il peut ainsi donner libre cours à sa fantaisie débridée, qui le pousse à rechercher des sujets hors du commun et à effectuer des choix iconographiques insolites. Dans la Visitation de Caprino Bergamasco, par exemple, découverte récemment, les principaux protagonistes sont presque introuvables tant ils sont noyés parmi le millier d’étranges personnages qui animent la scène. Un excentrique, donc, qui ne craint pas la surcharge ni le grotesque, qui déforme à plaisir les corps. Sa prédilection pour les postures contournées et les thèmes “titanesques”, comme les Travaux d’Hercule, lui permet de mettre en valeur tant les musculatures disproportionnées que sa virtuosité picturale.
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Le singulier Pagani
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°71 du 20 novembre 1998, avec le titre suivant : Le singulier Pagani