Pour sa 13e édition, la Biennale d’Issy-les-Moulineaux choisit de présenter des portraits sous la thématique « Portraits contemporains : selfies de l’âme ? ».
Ce thème est inspiré d’un commentaire d’Oscar Wilde à propos du Portrait de Dorian Gray : « J’ai mis trop de moi-même là-dedans. » L’exposition se déroule au Musée français de la carte à jouer et hors les murs dans la ville d’Issy-les-Moulineaux. Une soixantaine d’artistes sont conviés au sein d’un parcours libre, jalonné d’œuvres aux supports variés : peinture, photographie, sculpture, mais aussi vidéo et broderie. À l’heure du selfie assurément narcissique et de ses détournements, l’exposition questionne le spectateur sur les enjeux du portrait dans l’art contemporain : sa capacité à rendre compte de l’âme du sujet. Un paradoxe frappant suscite l’intérêt : dans cette exposition de portraits, on peine à distinguer les visages. Floutés, cachés, masqués, parfois même absents, ils semblent s’effacer pour accéder à l’intériorité du sujet. Avec la série photographique Abandonnée, Magali Maricot revient sur les tragédies de son enfance et crée un double autoportrait, où la fillette devenue femme dialogue avec son passé. La question identitaire est au cœur de l’exposition. Élise Toublanc, par exemple, photographie avec humour des inconnus de dos, vêtus de manière similaire. La sculpture Inconsolable du groupe Matéal (Juliette Frescaline et Cécile Meunier) représente un enfant dont les larmes interminables traduisent la spontanéité, un retour aux sources. Étrangers à nous-mêmes, le portrait semble nous aider à nous retrouver.
Cet article a été publié dans L'ŒIL n°728 du 1 novembre 2019, avec le titre suivant : Le portrait à l’heure du selfie