La vie de Marlène Mocquet (née en 1979) est un véritable roman. Elle n’a que 14 ans quand elle trouve dans la peinture un exutoire par lequel s’exprimer, face à une existence précaire et difficile.
Peindre, pour elle, c’est d’abord une question de survie. Une nécessité profonde qui la conduit à entrer aux Beaux-Arts de Paris. Elle a vingt ans et ne manque pas d’audace pour se lancer toute seule dans cette voie élitiste, telle une Cosette sans le sou avec pour unique bagage, son désir de peindre. Impertinente et passionnée, avec son minois à la Betty Boop et ses tenues excentriques, son univers foisonnant et sa manière peu conventionnelle d’aborder la peinture, Marlène Mocquet fascine.
Et elle attire la chance comme un aimant. Tout juste félicitée dans la promotion 2006, elle retient l’attention d’un membre du jury, l’artiste Daniel Firmin, qui la met en contact avec son galeriste, Alain Gutharc. Sans hésiter, celui-ci la fait entrer dans son groupe d’artistes et la présente au couturier Christian Lacroix. Il sera l’un des premiers collectionneurs de Marlène Mocquet et lui confiera même la réalisation d’une carte de vœux. S’en suivra le soutien décisif de François Pinault qui l’intègre dans son immense collection d’art contemporain.Nous sommes en 2007, et les choses s’enchaînent alors très vite pour la jeune artiste qui s’impose en quelques années sur la scène française et internationale. Marlène Mocquet multiplie les expositions personnelles : depuis la Fiac avec Alain Gutharc, jusqu’à la galerie new-yorkaise Haunch of Venison où elle fera un « sold out » en 2012. D’importantes expositions lui sont consacrées en France, à un moment où la peinture n’est pas encore au goût des institutions : ainsi le Musée d’art contemporain de Lyon, à l’initiative de Thierry Raspail (2009), la Fondation Galeries Lafayette ou le Musée de l’abbaye Sainte-Croix aux Sables-d’Olonne (2012). En un laps de temps très court, sa peinture a rejoint de grandes collections publiques et privées. Tout comme son univers singulier, déployé en peintures et céramiques, a été soutenu par de nombreux critiques d’art. Bien sûr, tout n’a pas toujours été facile. Y compris les collaborations avec les galeries. Certaines ont fermé du jour au lendemain, comme Haunch of Venison. D’autres ont vu Marlène Mocquet prendre son envol pour retrouver son indépendance : Alain Gutharc, en 2012, puis Laurent Godin, en 2014. Jusqu’à sa récente collaboration avec la galerie East, à Strasbourg, Marlène Mocquet a cheminé seule, s’occupant de son travail à l’atelier et de la gestion de sa carrière.
Mais l’artiste a toujours gardé sa combativité et son désir de peindre intacts, grâce, aussi, au soutien de sa « famille de cœur », collectionneurs et institutions fidèles. Mille fois, elle « meurt et renaît de ses cendres », dit-elle aujourd’hui en plaisantant. De même, son travail se renouvelle, comme l’artiste, au fil des années. Ses résidences à la Manufacture de Sèvres ont fait progresser ses sculptures en céramique, en lui apportant davantage de maîtrise technique, poussant le traitement instinctif de la matière vers plus de réalisme et de précision. Petit à petit, Marlène Mocquet a fait évoluer sa sculpture en direction de l’installation. En créant des œuvres immersives et interactives, elle conçoit chaque rendez-vous comme un monde déployé convoquant tous les sens.
Ce fut le cas de l’exposition très scénographiée et théâtralisée qui eut lieu à la galerie Julio Gonzales, à Arcueil. Ou de l’installation pérenne, avec volumes en suspension, réalisée dans l’escalier d’honneur de l’hôtel Richer de Belleval. L’univers de Marlène Mocquet prolifère et se réinvente, repoussant les limites de l’imaginaire mais aussi des médiums et des styles. Du sophistiqué au naïf, de l’informel au figuratif, du merveilleux à l’inquiétant, son œuvre se déploie sur le paysage sans fin de son intériorité. L’exposition de la Fondation GGL à l’hôtel Richer de Belleval rassemble toutes les facettes de cet univers hybride et polyforme. Des sculptures de buste évoquent les figures masculines qui ont compté dans la vie et le parcours de l’artiste, tandis qu’une sélection de tableaux rend compte de l’évolution de son style, du plus délié au plus maitrisé.
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Le monde intérieur de Marlène Mocquet
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°774 du 1 avril 2024, avec le titre suivant : Le monde intérieur de Marlène Mocquet