« Meissonier italien » ou « Flamand
du Piémont », les surnoms dont a été affublés Giovanni Battista Quadrone (1844-1898) évoquent bien le réalisme scrupuleux de cet artiste, connu d’abord pour ses tableaux de chasse. L’exposition de Turin entend donner une image plus nuancée de son travail, notamment à travers ses œuvres inspirées par la Sardaigne.
TURIN - Une rétrospective de Giovanni Battista Quadrone (1844-1898) présente à la Civica Galleria d’Arte Moderna de Turin cent tableaux de l’artiste et une trentaine de dessins. C’est la plus grande manifestation jamais consacrée au peintre de Mondovi, après la rétrospective posthume de 1899, puis l’exposition d’une cinquantaine de ses œuvres en 1922, et la double exposition Pasini-Quadrone de 1949. Quatre ans après l’édition du monumental catalogue raisonné en trois volumes, la manifestation turinoise souligne les aspects les plus intéressants et les moins connus de l’univers poétique de l’artiste. Et cela tout en explorant la totalité de sa production, dont on connaît surtout les scènes liées à des thèmes de chasse, inspirées de son expérience de chasseur militant, sa rare compétence cynégétique et sa précision d’éthologue dans sa façon de peindre les chiens. Les œuvres proviennent de collections publiques et privées. La sélection s’est effectuée soit autour des tableaux d’histoire du début de sa carrière, d’inspiration littéraire, réalisés lorsqu’il était à l’académie Albertina de Turin, soit autour de sujets de genres anecdotiques présentant des personnages en costumes d’autrefois, typiques de la décennie 1870-1880, soit encore autour des incontournables tableaux de chasse. Ont toutefois été privilégiés les sujets sardes de 1883 à 1889, les paysages animés de la dernière période et les tableaux consacrés à la vie plus secrète du cirque, dans lesquels on perçoit mieux la nouveauté et l’essence d’un langage objectif et minutieux, riche de détails soignés et pertinents, d’un hyperréalisme lenticulaire. Ce même langage, dans certains tableaux, comprend des volets humoristiques, ce qui a aliéné à l’artiste les sympathies de la critique de son temps. Mais lorsqu’il traite de la description et de l’interprétation des lieux, des traditions et des gens de Sardaigne, Quadrone enregistre avec gravité et solennité un monde primitif encore intact, d’un extrême intérêt poétique et documentaire. Pendant que ses collègues allaient chercher l’exotisme en Afrique du Nord ou au Moyen-Orient, Quadrone l’a trouvé à quelques heures de bateau à vapeur du continent. Il a été le seul peintre italien du XIXe siècle à documenter avec continuité et une véritable compréhension les coutumes et les paysages de l’île. Sa façon de penser et de travailler typique d’un esprit analytique, qui ne pouvait que l’opposer à une critique complètement obnubilée par des expressions plus synthétiques, lui a valu une notoriété européenne. Sa pensée et sa manière fidèle constituent les marques d’une personnalité incomparable, qui se manifeste tout aussi bien dans ses œuvres consacrées à la vie du cirque, un sujet guère en vogue en Italie.
Cette nouvelle exposition a donc pour but de montrer l’originalité et la force de cet artiste, qui vont bien au-delà de certaines étiquettes traditionnelles et limitatives dont on l’a affublé, comme celles du “Meissonier italien”, “du Flamand du Piémont”, ou de “peintre de la chasse et des chiens”. Elle a également pour but de mieux faire connaître, en présentant des huiles réalisées sur le motif, des dessins, des “préparations au goudron” sur papier velin ou en bistre qui annoncent ses célèbres clairs-obscurs, la finesse et la complexité de sa technique.
- GIOVANNI BATTISTA QUADRONE, jusqu’au 29 septembre, Galleria civica d’arte moderna, Via Magenta 31, Turin, tél. 39 011 442 95 18, tlj sauf lundi 9h-19h.
L’accès à la totalité de l’article est réservé à nos abonné(e)s
Le Flamand du Piémont
Déjà abonné(e) ?
Se connecterPas encore abonné(e) ?
Avec notre offre sans engagement,
• Accédez à tous les contenus du site
• Soutenez une rédaction indépendante
• Recevez la newsletter quotidienne
Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°151 du 14 juin 2002, avec le titre suivant : Le Flamand du Piémont