L’avènement du baroque est concomitant d’une évolution de la pensée, de la métamorphose de nos modes de perception et du changement fondamental des paradigmes qui régissaient jusqu’alors le fonctionnement du monde.
Il est synonyme de la possibilité d’une liberté que réfrénaient les structures mentales phagocytées par des siècles et des siècles de modélisation fondée sur l’équilibre et l’harmonie. Résolument différent en cela de l’idéal classique, le baroque ouvre le monde à sa propre découverte. Étonnante époque, en vérité, où le monde voit mises à bas ses certitudes, ses habitudes et ses convenances.
L’exposition « Baroque 1620-1800, le style à l’âge de la magnificence » que l’on peut voir au Victoria and Albert Museum de Londres est l’occasion de se replonger dans cet univers écartelé entre toutes sortes de contradictions, notamment entre l’être et le paraître. Elle est l’occasion de revisiter les pièces d’un style qui a une peur panique du vide et pour cela prône la saturation. Qui dénie à la ligne toute rectitude. Qui privilégie la courbe et la rupture. Qui favorise l’effluve et la sensualité. Qui célèbre la magnificence.
Comme en témoignent nombre de pièces présentées à Londres – telles les envolées sculpturales du Bernin (1665), les peintures encombrées de Giovanni Paolo Panini, les argenteries de Jean-François Cousinet –, le baroque est du côté de l’ellipse, de la stridence, de la dissonance, de la modulation, de l’informel, de l’étrange et de l’imprévisible. En cela, comme l’énonce l’un de ses plus fins exégètes, Victor-Louis Tapié, le baroque est « le reflet dans les sensibilités et les expressions de périodes de transition, de difficultés internes, de remise en cause de valeurs traditionnelles, d’un affleurement de tendances profondes, douloureuses parfois, inquiètes toujours ».
L’exposition londonienne du Victoria & Albert Museum se veut comme le catalogue bruyant et clinquant d’une production plastique qui s’en va dans tous les sens et qui se conjugue à tous les modes et à tous les temps de l’éclectisme. Attribuée à Caterina de Julianis, Le Jugement des damnés (vers 1690-1700) est une peinture qui traite du thème de la vanité. Mais au lieu de l’image humble et forte d’un simple crâne et de quelques fleurs sur fond monochrome, c’est un fourre-tout tonitruant de motifs en tous genres.
« Baroque 1620-1800 : Style in the age of Magnificence », Victoria and Albert Museum, Cromwell Road, Londres (Grande-Bretagne), www.vam.ac.uk/baroque, jusqu’au 19 juillet 2009.
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Le baroque
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans L'ŒIL n°614 du 1 juin 2009, avec le titre suivant : Le baroque