Cette civilisation antique, qui s’est développée sur les bords du Nil, dans l’actuel Soudan, est à l’honneur au Musée du Louvre.
PARIS - Il faut gravir une dune de sable d’or balayée par le vent pour découvrir un panorama éblouissant : alignées sur les crêtes, une multitude de pyramides, souvent éventrées, témoignent de la puissance de la civilisation qui érigea pour ses morts ces tombeaux. L’endroit semble immuable, hors du temps, semblable à ces gravures rapportées par le voyageur nantais Frédéric Caillaud (1787-1869). Lui aussi fut pris de vertige devant ce spectacle qui se présenta à lui en ce matin du 25 avril 1822 : « Mon premier soin fut de gravir sur une éminence, pour embrasser d’un coup d’œil l’ensemble des pyramides. J’y restais immobile de plaisir et d’admiration à la vue de ce spectacle imposant. »
Nous sommes dans la nécropole de Méroé, à quelques kilomètres du Nil, à environ deux cents kilomètres au nord de Khartoum, dans l’actuel Soudan. Ici, lieu de multiples croisements culturels africain, égyptien, grec et romain, s’épanouit entre le IIIe siècle avant J.-C. et le IVe siècle après J.-C. une civilisation antique autonome.
L’influence de la grande civilisation de la vallée du Nil est partout présente, en premier lieu dans le panthéon méroïtique, avec une référence constante au dieu Amon. Les pyramides aussi ont des origines égyptiennes. Huit siècles (!) après l’abandon par les pharaons de ces monuments funéraires, les rois de cette région du Nil se les approprièrent, dans des dimensions certes plus modestes puisque leur taille n’excède pas 30 mètres de haut. Ces constructions ne renferment pas non plus le tombeau qui se trouve à proximité, la pyramide venant simplement le signaler.
Ici comme sur les parois des temples se déploient de nombreux bas-reliefs directement inspirés de l’art égyptien. L’écriture hiéroglyphique est elle aussi employée, même si le méroïtique bénéficie aussi de sa propre écriture (lire ci-dessous). Les influences grecques se laissent par exemple lire sur un bas-relief d’une colonne du temple d’Apedemak, à Moussawarat es-Soufra. Là, un Apademak ailé terrasse un guerrier qui prend une pose extrêmement… hellénistique ! Typiques sont en revanche les représentations des candaces, les reines régnantes, avec leurs formes féminines généreuses.
Gobelets en verre peints
Pour mieux connaître cette civilisation, le Louvre a engagé en 2007 un programme de fouilles à Mouweis, au Soudan, à une cinquantaine de kilomètres au sud de Méroé. Les équipes de Michel Baud mettent au jour les vestiges d’une ancienne ville bâtie sur le bord du Nil. L’exposition que consacre actuellement le Musée du Louvre à la civilisation méroïtique fait le point sur l’avancée de ces recherches. Articulée autour de onze sections, « Méroé, un empire sur le Nil » présente un bel ensemble de pièces trouvées au Soudan, liées à la vie quotidienne, mais aussi des objets de prestige comme ces gobelets en verre peints présentant des dieux du panthéon égyptien.
Le clou de l’exposition est sans aucun doute cette exceptionnelle statue de roi archer provenant du Musée national du Soudan à Khartoum. Cette statue royale en bronze stuqué symbolise à elle seule la puissance et le mystère de la civilisation méroïtique.
Commissaires : Guillemette Andreu-Lanoë, Michel Baud et Aminata Sackho-Autissier, département des Antiquités égyptiennes, Musée du Louvre
Nombre de pièces : 172
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À la rencontre de Méroé
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Abonnez-vous dès 1 €MÉROÉ, UN EMPIRE SUR LE NIL, jusqu’au 6 septembre, Musée du Louvre, Paris, www.louvre.fr, tlj sauf mardi 9h-18h, mercredi et vendredi 9h-22h. Catalogue, 288 p., 39 euros
Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°322 du 2 avril 2010, avec le titre suivant : À la rencontre de Méroé