Photographie

La nature chamanique de Manuela Marques

Par Christine Coste · Le Journal des Arts

Le 31 janvier 2019 - 459 mots

LODEVE

La photographe s’inspire des collections du Musée de Lodève pour mettre en scène des objets et des éléments prélevés dans la nature environnante.

Lodève. En juillet 2018, la réouverture du Musée de Lodève, agrandi et restructuré, découvrait un nouveau visage aussi séduisant qu’impressionnant concernant la présentation et la médiation de ses collections. Six mois plus tard, Manuela Marques marque un autre temps fort de la nouvelle vie du musée, qui inaugure avec l’artiste sa première exposition d’art contemporain. La trentaine de photographies et les deux vidéos nées de la résidence proposée en 2015 à l’artiste par la directrice du musée Ivonne Papin-Drastik ne laisse pas indifférent. De sa découverte des collections avant la fermeture du musée et de ses différents séjours sur le site de Cantercel (site expérimental d’architecture), Manuela Marques fait émerger des images poétiques et solaires. Elle reformule le paysage à partir de fragments minéraux ou végétaux prélevés dans cette région aride et d’une plaque de Plexiglass miroir noir installée in situ.

Un lien étroit avec l’objet

Les pierres lévitent chez Manuela Marques ; des brassées de fleurs sauvages aux couleurs vives, vivifiantes, s’entremêlent dans un méli-mélo enchanteur sur fonds de ciel bleu aussi rayonnant ; un morceau de bois anodin devient une figure sculpturale bien plus monumentale qu’une pierre levée du causse du Larzac, tandis qu’une main en bout de bras se fait bloc de pierre entaché de rouge. Deux images en fin de parcours livrent quelques bribes de ses secrets de prestidigitatrice ou de chamane. La transformation passe par l’installation, le miroir, la lumière, l’interaction et l’aléatoire qu’incarne le vent en ces terres à la météo contrastée d’une heure à l’autre.

À partir d’un périmètre restreint sur le terrain et de quelques éléments de son identité, tout en s’attachant à l’identité des collections, Manuela Marquès élabore un regard, mais aussi un univers personnel qui balaie les échelles, touche au sensible, aux interfaces, à la trace, au déplacement et au beau, flirte avec la sculpture et le land art. Pierres, fleurs ou graines se font paysages. La main serre une pierre anguleuse ou porte sur l’un de ses doigts une mante religieuse gracile. L’articulation des photographies dans l’exposition comme dans le livre (éditions Loco) renforce la puissance de chaque cliché sans jamais créer de dissonances. Résonance, contrepoint et altération construisent une syntaxe visuelle sensible.

Grands formats et vidéos s’épanouissent dans les beaux volumes du premier étage du musée réservé aux expositions temporaires. Les œuvres forment une suite (au sens musical du terme), dont l’unité de lieu (le site de Cantercel) n’est pas d’ailleurs sans rappeler celle qui prévaut dans le travail sur le château de Versailles que l’artiste mena quelques temps auparavant en 2014-2016 et que la galerie Anne Barrault présentera en mars-avril 2019.

 

 

Manuela Marques. Et le bleu du ciel dans l’ombre,
jusqu’au 19 mai, Musée de Lodève, square Georges Auric, 34700 Lodève, www.museelodeve.fr

Thématiques

Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°516 du 1 février 2019, avec le titre suivant : La nature chamanique de Manuela Marques

Tous les articles dans Expositions

Le Journal des Arts.fr

Inscription newsletter

Recevez quotidiennement l'essentiel de l'actualité de l'art et de son marché.

En kiosque