Les relations entre les artistes modernes et la Côte d’Azur ont été peu explorées. Aussi l’ensemble des manifestations consacrées à ce sujet cet été dans vingt-huit musées et treize villes de la Côte d’Azur apporte-t-il de riches éclairages sur quelques pans de l’histoire de l’art de notre siècle. Instructive sur le fond, la manifestation pèche parfois par la forme.
NICE - Nombreux sont les artistes qui ont résidé et travaillé sur la Côte d’Azur. Les musées du littoral méditerranéen conservent souvent des œuvres témoignant de ces séjours, données par quelques amateurs ou par les créateurs eux-mêmes. Certains ont même légué suffisamment de pièces pour constituer de véritables musées, à l’image de Matisse à Nice et de Picasso à Antibes. À travers les différentes époques, du début du siècle à la fin des années cinquante, au gré de la personnalité des différents artistes, plus prompts aux rendez-vous mondains ou recherchant au contraire le calme de l’arrière-pays, cette histoire est nécessairement plurielle.
Les commissaires de l’exposition "la Côte d’Azur et la Modernité" ont choisi d’éclater la manifestation dans une trentaine de musées et de centres d’art, de Cannes à Menton. Ce choix, s’il représente une gageure au niveau de l’organisation, rend pourtant moins percutant le propos. Les expositions sont forcément d’un niveau inégal, quand les conservateurs n’ont pas été contraints d’exposer des œuvres très moyennes pour se conformer à la problématique. Mais surtout, demander aux amateurs d’art, même très motivés, de faire une trentaine d’étapes, soit plus de trois heures de transport – sans compter les bouchons –, présume sans doute un peu de leurs forces. Une exposition plus resserrée aurait probablement mieux servi le propos, tout au moins sur le plan pédagogique puisque l’éclatement géographique ne peut conduire qu’à son morcellement. La lumière du Sud a, dès le début du siècle, fait une forte impression sur les artistes venus y résider, en leur révélant une couleur exceptionnelle. Le Musée Picasso d’Antibes consacre son exposition à l’influence de cette luminosité sur le travail des créateurs. Un cabinet réunit un bel ensemble de petites huiles de Signac, des vues d’Antibes depuis la mer (1918-1919).
Pourtant, certaines peintures, en dehors de quelques pièces, tel ce Portrait dans la glace (1939) de Bonnard, ouvertement "surexposé", ne sont pas toujours les plus significatives. À Nice, le Musée Matisse a mis à l’honneur le mythe méditerranéen. Ainsi, de Matisse à Picasso et de Dufy à Survage, sont déclinés thèmes balnéaires et mythologiques. Ker Xavier Roussel excelle dans ce dernier exercice, comme cette représentation allégorique du Cap d’Antibes, ou cette autre de la Méditerranée, même si ces œuvres s’éloignent quelque peu de l’esprit "moderne". Cet esprit, nous le retrouvons pourtant à Vence, au château de Villeneuve. Aux côtés de fortes individualités telles que Matisse, Chagall, Dufy ou Dubuffet, des créateurs locaux ont réalisé une œuvre parfois étonnante. Outre les toiles naïves de Marthe Isely, la "confidente des marins", ou les créations "alimentaires" du poète Georges Ribemont-Dessaignes, les salles du château révèlent l’extraordinaire inventivité d’un pâtissier "malgré lui", Francis Palenc. Plus conforme à une histoire orthodoxe de l’art, le Musée d’art moderne et d’art contemporain de Nice propose une esquisse des différentes étapes locales de l’avant-garde, de Duchamp et Man Ray à Klee et Kandinsky, de Michaux et Klein à Bacon et Malaval. Les créations les plus contemporaines se donnent rendez-vous à la Villa Arson, où l’histoire continue de s’écrire avec Pierre Joseph et la jeune Ingrid Luche.
LA CÔTE D’AZUR ET LA MODERNITÉ, jusqu’à fin octobre, différents lieux de Cannes à Menton. Informations tél. au 04 92 07 73 71.
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La modernité en vacances
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Abonnez-vous dès 1 €Cet article a été publié dans Le Journal des Arts n°42 du 29 août 1997, avec le titre suivant : La modernité en vacances